Arrête-moi si tu peux, film de Steven Spielberg, commentaire

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Arrête-moi si tu peux,
      (Catch me if you can),   2002, 
 
de : Steven  Spielberg, 
 
  avec : Leonardo di Caprio, Tom Hanks, Christopher Walken, Martin Sheen, Nathalie Baye,
 
Musique : John Williams


 
Lire le poème (CinéRime) correspondant : ' Ballet chimérique '

 
Frank Abagnale sr. (Christopher Walken) tient un commerce et mène une vie paisible avec sa femme Paula (Nathalie Baye) et son fils de 16 ans Frank jr. (Leonardo Di Caprio). Mais le fisc se met à poursuivre Frank sr. pour malversations et les ennuis commencent. La famille est d'abord obligée de troquer la somptueuse villa pour un petit appartement. Puis, un malheur n'arrivant jamais seul, le jeune garçon découvre que sa mère a un amant. Le jour où il est sommé de choisir de suivre son père ou sa mère parce que ses parents divorcent, une brisure se fait en lui. Il s'enfuit et commence à s'inventer différentes professions et personnalités qui lui permettent rapidement, son talent et son charme aidant, de gagner malhonnêtement, mais très efficacement sa vie. Malheureusement pour lui, un agent du FBI, Carl Hanratty (Tom Hanks), particulièrement opiniâtre, le poursuit inlassablement... 
 
 Un adolescent blessé (Leonardo di Caprio) contraint de se séparer de son père (Christopher Walken, toujours charismatique, dans un rôle sympathique, ce qui est assez rare pour être souligné !) qu'il admire et, par conséquent en quête d'un adulte susceptible de le remplacer. Un homme blessé par la vie, contraint de se séparer de sa petite fille qu'il adore et ne voit pratiquement plus... Comme il est dit dans les romans de gare, ces deux-là étaient faits pour se rencontrer ! Mais le destin veille à ce que les unions, qu'elles soient amoureuses ou amicales, ne se vautrent pas dans la facilité. C'est donc au jeu , parfois burlesque, parfois désespéré, parfois dangereux, du chat et de la souris, du gendarme et du voleur, que vont se livrer, pendant plusieurs années, Frank et Carl. Le premier est un gamin facétieux, inventif, sentimental qui oublie sa détresse et sa solitude dans le risque permanent (la scène significative dans laquelle Frank appelle au téléphone le policier, le soir de Noël, en lui donnant les coordonnées de l'endroit où il habite, ce que Carl prend pour un mensonge !). Le second est un être taciturne, sombre qui noie son désespoir latent dans l'abrutissement au travail. 
 
 Steven Spielberg filme avec tendresse, inventivité (le générique bourré de trouvailles constitue une entrée en matière particulièrement adéquate), légèreté, originalité, intensité cette poursuite infernale qui comporte son lot de scènes humoristiques, émotionnelles, dramatiques. L'équilibre est remarquablement tenu. Le rythme ne faiblit jamais. La reconstitution d'époque est efficace dans la simplicité, même si l’on peut être surpris et passablement choqué de voir une prison française qui ressemble fort à une geôle moyenâgeuse ! Tom Hanks est, à son habitude, remarquable d'intensité maîtrisée. Mais la surprise, fort agréable, vient à mon sens de Leonardo di Caprio. Cet acteur n'est pas l'un de ceux pour lesquels j'éprouve une particulière affinité, même si sa prestation dans "Titanic" était en tous points remarquable. Ici, il se glisse avec une aisance confondante dans ce personnage à multiples facettes, qui joue avec habileté et superficialité de ses charmes et de son bagout, mais est victime d'une souffrance intérieure profonde. Cette ambivalence est subtilement amenée par le réalisateur et l'acteur s'y plie avec une sensibilité exacerbée qui mérite l'admiration. 
 
 Reste que l'on n'a jamais l'impression que cette histoire (vraie) peut se terminer tragiquement. Il y a tout au long de ces deux heures vingt qui passent comme l'éclair une impression de jeu qui, malgré les événements tragiques (l'abandon de Brenda Strong (Amy Adams), la mort de Frank Abagnale sr., l'emprisonnement... ), empêche d'envisager le pire. Nous sommes donc bien loin du final-tragédie de "Butch Cassidy et le Kid". Ici, c'est une conclusion pied de nez qui clôt joyeusement cette fantaisie dense et passionnante.
   
Bernard Sellier