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« Le degré de spiritualité n'a rien à voir avec ce en quoi vous croyez, mais tout à voir avec votre état de conscience. » Eckhart TOLLE
Guérir la violence
Le texte ci-dessous est extrait du sitede Thich Nhat Hanh Retraite d’automne, le 13 Novembre 2005, Hameau du Haut.
Bonjour mes amis, j’espère que vous avez assez dormi cette nuit. Je ne sais pas si monsieur Jacques Chirac a bien dormi car la violence continue en France, dans les banlieues Parisiennes et dans les autres villes. Pendant la nuit j’ai essayé d’envoyer mon énergie de paix aux jeunes gens en France. Les émeutes, la violence qui s’est manifestée en France pendant les quinze dernières journées nous disent qu’il y a un malaise profond en France et dans le monde. Et notre pratique est de regarder avec beaucoup d’attention pour pouvoir reconnaître ce malaise-là. Et pour comprendre, il faut aussi écouter ; il faut essayer d’écouter les gens. On ne peut pas transformer la violence par des menaces. On va vous punir, on va vous déporter, des choses comme ça, cela n’aide pas beaucoup. Les jeunes souffrent. C’est un fait. C’est une réalité. Et parce que les jeunes souffrent, les adultes souffrent eux aussi ; et tout le monde souffre. La souffrance est là. Il faut regarder en profondeur pour pouvoir détecter, pour pouvoir trouver la cause, la cause profonde ; c’est la deuxième vérité noble. La souffrance en est la première. Et en regardant en profondeur dans la première on peut découvrir la deuxième vérité noble : ce malaise-là, cette souffrance-là, ces racines profondes.
Au Village des Pruniers on nous enseigne qu’il faut regarder, il faut parler, il faut poser des questions : « Chéri(e) je sais que tu souffres, dis-moi ce qui est dans ton cœur. Je veux comprendre, je veux comprendre ta souffrance, sinon je vais continuer à te faire souffrir ». Donc, il faut regarder et il faut observer. Il faut écouter et il faut savoir comment parler aux gens. Imaginez que nos dirigeants politiques savent comment utiliser ce langage aimant : « Jeunes amis, je sais que vous souffrez. Il y a le mécontentement en vous. Il y a de la souffrance en vous et nous voulons savoir. Nous voulons vous écouter, il faut nous dire. Vous avez fait cela, c’est parce que vous souffrez et peut-être nous avons fait quelque chose qui a déclanché cette violence, ces souffrances en vous ».
En fait il y avait des policiers qui ont pourchassé, qui ont couru après des Jeunes, et ces Jeunes-là ont été électrocuté pendant qu’ils essayaient de s’échapper ; et c’est cela le commencement qui a déclanché une série d’émeutes dans les banlieues de Paris.
Pour gouverner il faut autre chose que le pouvoir. Le pouvoir ce n’est pas suffisant du tout. Vous pouvez nous punir, vous pouvez menacer, mais ça ne marche pas avec cette menace, cette punition. Il faut savoir parler aux gens et les écouter. Et nos leaders politiques, nos dirigeants politiques n’ont pas été entraîné dans cette voie de bonne communication. Il faut avant tout communiquer. Il faut avoir l’art de la communication. Il faut savoir parler aux gens. Il faut savoir écouter les gens. Nous avons besoin d’une dimension spirituelle dans notre vie sociale quotidienne. La vie économique ce n’est pas tout, il faut du spirituel. Il faut pratiquer. Il faut vivre en telle sorte que nous puissions avoir cette capacité de reconnaître la souffrance, d’embrasser la souffrance pour pouvoir la transformer ; transformer la souffrance en soi et transformer la souffrance dans l’autre personne, dans les autres personnes. Et la politique aussi doit avoir cette dimension spirituelle. Je viens d’écrire une lettre au Président du Vietnam et j’ai parlé de cela : il faut une dimension spirituelle dans votre vie politique. C’est parce qu’il y a de la souffrance, de la violence, du désespoir dans le peuple. Alors il faut faire attention à tout cela. J’ai proposé des choses concrètes afin de pouvoir amener une dimension spirituelle à la vie politique et économique. Il faut savoir dire des choses comme : « Chers amis, nous ne pouvons pas gouverner si vous ne nous aidez pas, il faut nous aider pour que nous puissions gouverner ». Il faut dire cela et c’est une chose vraie, il faut le soutien du peuple pour pouvoir gouverner. « Cher amis, cher peuple, nous avons besoin de vous, de votre soutien, pour pouvoir gouverner. Vous nous avez désigné pour faire le travail, alors nous avons besoin de vous. Il faut nous dire ce qui est dans votre cœur. Il faut nous dire ce que nous devons faire et ce que nous ne devons pas faire ».
La pratique de l’écoute profonde est essentielle pour pouvoir renouer les liens, pour pouvoir restaurer la communication, l’écoute profonde et le parler aimant. Et si vous avez trop de violence en vous, vous ne pouvez pas faire cela, écouter avec compassion. C’est parce que la graine de colère, la graine d’irritation est trop importante en vous, alors vous ne pouvez plus écouter. C’est parce que le discours arrose les graines de la violence, de la haine, de la colère en vous, et vous ne pouvez plus écouter. C’est parce que le discours arrose ces graines-là. Alors il faut s’entraîner pour pouvoir écouter l’autre, en telle sorte que les graines en vous, les graines de colère, les graines de violence en vous ne soient pas arrosées même si le discours est violent. C’est une chose difficile, mais le Boddhisattva Avalokita a pu le faire, et beaucoup de ses disciples sont capables de le faire aussi. Il y a ceux et celles d’entre nous qui peuvent écouter avec compréhension, avec compassion, même si le discours est plein d’injustices, plein de colères, de jugements, de condamnations, d’accusations. Même si le discours est violent, on peut écouter si on a de la compassion en soi-même.
Et on doit savoir comment utiliser le langage aimant afin de pouvoir communiquer ce qui est dans notre cœur. Sans ce langage aimant on ne parvient pas à communiquer, à dire ce qu’il y a dans notre cœur. C’est parce que sans cette manière de parler l’autre personne ne va pas pouvoir recevoir, ne va pas pouvoir écouter ce que nous voulons lui dire. Donc le parler aimant et l’écoute profonde, compatissante sont indispensables. Il faut que nos dirigeants politiques sachent comment faire.
Dans une famille, dans une communauté, la situation est la même. La vie de couple…on doit pratiquer cela dans la vie de couple. Cette personne a de la souffrance en elle, a de la violence en elle, a du désespoir en elle, et l’autre personne aussi a des graines de désespoir, de violence, de colère. Alors la situation est devenue difficile et la communication est impossible. On songe au divorce. On songe à la séparation, c’est parce qu’on ne peut pas parler ensemble. On ne peut pas parler l’un à l’autre. La pratique qui nous a été proposée par le Bouddha c’est pour restaurer la communication, et si on s’entraîne dans l’art de communiquer, on s’entraîne dans l’art de l’écoute profonde et compatissante, alors on peut restaurer la communication. Et ce n’est pas quelque chose de trop difficile.
« Chéri (e), je sais que tu souffres, je sais qu’il y a de la violence, de la peur, du désespoir en toi. Dans le passé, je n’ai pas pu t’aider et j’ai rendu la situation pire. Je suis navré, ce n’est pas mon intention de te faire souffrir, mais je t’ai fait souffrir à cause de ma maladresse. J’ai réagi d’une manière violente. Maintenant je sais que ce n’est pas une bonne voie. Maintenant je sais que je dois t’écouter ; donc, chérie, dis-moi ce qui est dans ton cœur, quelle est ta souffrance, ton désespoir, ta colère. Je veux comprendre tout cela pour ne plus faire des bêtises, pour ne plus dire des bêtises. C’est parce que je ne veux pas continuer à te faire souffrir. Il faut m’aider. Chéri(e), dis-moi ce qui est dans ton cœur. Dis-moi ce que je dois faire. Dis-moi ce que je ne dois plus faire. Dis-moi ce que je dois dire, ce que je ne dois plus dire. J’ai besoin de toi. J’ai besoin de ton aide ».
C’est exactement cette sorte de langage dont on a besoin, et si on peut parler ainsi, alors on peut ouvrir la porte de son cœur. Il faut être sincère. Ouvrir le cœur de quelqu’un c’est une chose faisable avec le parler aimant. Les Jeunes qui souffrent, les Jeunes qui font de la violence, ce sont nos enfants, nos petits-enfants, nos jeunes frères, nos jeunes sœurs. Ils souffrent, elles souffrent, alors il faut s’adresser à eux, à elles, avec la compassion ; et nous attendons que le Président, le Premier Ministre, le Ministre des Affaires Intérieures fassent cela pour apaiser la colère, pour déclencher, pour restaurer la communication. C’est très important.
Si nous sommes un couple, alors il faut s’asseoir ensemble, il faut recommencer. C’est possible de recommencer. C’est possible de faire un nouveau départ ; et cela avec la pratique de l’écoute compatissante, l’écoute profonde et la parole aimante. Nous avons offert des centaines, des milliers de retraites de la Pleine Conscience un peu partout dans le monde, et à chaque fois, dans chaque retraite, il y a des couples qui se réconcilient. C’est parce qu’ils savent comment utiliser l’instrument que nous leur avons offert : l’écoute profonde, l’écoute compatissante et le langage aimant. Il y a d’innombrables jeunes personnes qui ont pu se réconcilier avec leur père, avec leur mère, par la pratique. Il y a des partenaires, des maris et des femmes, qui se sont réconciliés à cause du fait qu’ils savent utiliser l’instrument, l’instrument de dialogue, l’instrument qui peut restaurer la communication, renouer les liens. Vous êtes un papa, un père, vous avez des difficultés avec votre fils. Vous êtes un père : c’est quelque chose comme si vous étiez le Premier Ministre ; vous êtes le Président : vous avez le pouvoir d’un père ; mais si vous n’exercez que le pouvoir, l’autorité d’un père vous ne pouvez pas réussir. Votre fils, votre fille ; elle est encore jeune et elle a déjà en elle de la souffrance, de la frustration, de la colère. Alors il faut reconnaître sa souffrance. Il faut savoir comment traiter cette souffrance en lui, en elle. Il faut utiliser la même sorte de langage : « mon fils, ma fille, je sais que tu souffres. Je ne veux pas que tu continues à souffrir. Je ne veux pas te faire souffrir plus. J’ai réagi avec maladresse dans le passé et j’ai rendu la situation pire. Maintenant je ne veux plus continuer comme cela. Je veux faire un nouveau départ. Donc mon fils, ma fille, il faut me dire ce qui est dans ton cœur. Je veux savoir. Si je te comprends enfin, je ne ferai pas des bêtises qui continuent à te faire souffrir, car si tu souffres, je souffre aussi.»
Alors dire quelque chose comme ça, ce n’est pas trop difficile. C’est parce que lorsque vous réalisez que l’autre personne souffre, vous n’avez alors plus l’intention de la punir. Vous avez l’intention de faire quelque chose pour pouvoir soulager sa souffrance, et la chose que vous pouvez déjà faire, c’est de lui parler à lui, à elle, avec ce langage de compassion : « Chéri(e), je sais que tu souffres, je sais que j’ai contribué à cette souffrance-là. Je n’ai pas l’intention de te faire souffrir ; c’est à cause de mes maladresses et du fait que je ne t’ai pas compris ; alors il faut m’aider, mon chéri, ma chérie ». C’est une chose faisable et cela peut prendre une demi-minute pour le faire. Si vous avez l’éveil, la compréhension et un peu d’amour, de compassion dans votre cœur, alors vous pouvez le faire tout de suite. Beaucoup de gens dans les retraites de Pleine Conscience nous ont rapporté qu’avec leur téléphone portable ils ont pu rétablir la relation avec leurs proches. Des garçons ont pu se réconcilier avec leur papa en utilisant le téléphone portable à la cinquième journée de la retraite. Les miracles se produisent toujours dans les retraites, et c’est parce que dans une retraite la graine de la compréhension et la graine de la compassion sont arrosées ; c’est parce que vous voyez, parce que vous entendez, et soudain vous sentez que vous avez cette capacité à utiliser le langage aimant. Vous avez l’instrument, vous avez la clé pour ouvrir le cœur, la porte du cœur chez l’autre personne. Dans une communauté c’est la même chose. Nous vivons dans cet âge, un âge de violence. La violence est pénétrée en nous. Nous avons nous tous cette graine de violence et de désespoir en nous, alors pratiquer, c’est reconnaître la présence de ces graines-là, afin de pouvoir les transformer. Quand on vit dans une communauté on regarde tout les autres avec compréhension, avec compassion. La communauté est un organisme et chaque personne, chaque membre de la communauté est une cellule de l’organisme. Alors, quand on regarde comme ça autour de soi-même on reconnaît cette sœur qui est une cellule de l’organisme, comme soi-même. Moi je suis une cellule et elle aussi est une cellule. Quand on regarde ce frère on voit que l’autre aussi est une cellule du corps. La Sangha a un corps. Sangha veut dire communauté. Si vous avez un corps, la Sangha a aussi un corps, « le corps de Sangha » : Sanghakaya, le corps de Sangha. L’autre constitue une partie du corps de la Sangha, et tout le monde dans la Sangha constitue une partie de la Sangha ; alors on peut déjà regarder et reconnaître l’autre comme une partie, une cellule de l’organisme de la Sangha. Alors si cette personne souffre, on souffre aussi. Quand on souffre de la coupure d’un doigt, alors c’est tout l’organisme qui souffre avec. On peut regarder autour de soi pour voir et reconnaître tout le monde qui est là, qui appartient au corps de la Sangha ; et il faut faire quelque chose, ou bien il faut s’abstenir de faire quelque chose, pour pouvoir aider cette personne à ne plus souffrir, à souffrir moins. Et cela on le fait pour lui, pour elle, mais on le fait en même temps pour soi-même. Quand vous parlez à un membre de la Sangha, vous parlez en telle sorte que la souffrance en lui ou en elle puisse se transformer. Avec de la compréhension, avec de la compassion, votre discours, ce que vous dîtes va pouvoir reconnaître, embrasser et transformer cette souffrance en lui ou en elle. Vous le faites pour lui, pour elle, mais vous le faites aussi pour vous-même. C’est parce que dans une communauté nous inter-sommes.
Dans une vie de couple c’est la même chose. Quand l’autre personne souffre, vous souffrez aussi. « Chéri, je ne veux pas te faire souffrir, parce que je sais que si tu souffres je souffre aussi. Tu es mon corps, je suis ton corps aussi ; même si nous sommes deux, nous sommes une Sangha, une communauté, et chacun de nous est une cellule du corps de la Sangha. Alors, tu es moi et moi je suis toi. Je m’occupe de toi et toi, tu t’occupes de moi, comme cela nous sommes une communauté heureuse ».
Dans une relation père et fils, mari et femme, frère et sœur, la souffrance n’est plus une chose individuelle, c’est clair. C’est parce que si l’autre souffre nous souffrons aussi. Si le père souffre énormément c’est impossible pour le fils d’être vraiment heureux. Alors il faut faire quelque chose pour le père, pour que le père souffre moins. Et c’est la pratique du fils. Et si le père voit que le fils souffre beaucoup alors il doit faire quelque chose pour que son fils souffre moins. Ce n’est pas seulement pour son fils mais pour lui-même également. Donc, on dit que la souffrance n’est pas une chose individuelle ; le bonheur aussi ce n’est pas une chose individuelle. Si l’autre personne est heureuse alors on peut partager ce bonheur. Dire quelque chose, faire quelque chose pour pouvoir rendre heureuse cette personne ; et vous faites cela non seulement pour elle mais aussi pour vous. Donc, dans une vie de couple, dans la vie communautaire, dans une nation, la souffrance d’une section de la communauté est la souffrance de toute la communauté. La souffrance d’une personne est la souffrance du couple.
Quand on souffre on peut prier. Prier peut nous aider à souffrir un peu moins. Mais la prière la plus concrète, la plus efficace, c’est la pratique. Il faut de la compréhension : je sais qu’elle souffre, je sais que j’en suis responsable à un certain degré. C’est la compréhension. Je vais essayer de ne plus la faire souffrir : c’est de la bonne intention. Je sais que si je suis capable de l’écouter alors elle souffre moins. Donc je vais lui parler avec le langage aimant. Je vais lui demander de me dire ce qui est dans son cœur. Je vais faire de mon mieux pour pouvoir écouter, pour pouvoir écouter avec tout mon cœur, afin de pouvoir lui offrir, à lui ou à elle, un soulagement. C’est parce lorsque l’on écoute comme cela on soulage la peine de l’autre, seulement en écoutant ; et si l’on peut parler à l’autre personne avec le langage aimant on soulage beaucoup la souffrance en l’autre personne.
Nos politiciens pensent que les souffrances ont des racines dans la pauvreté. Bien sûr, la pauvreté est une cause de la souffrance mais ce n’est pas la cause unique. Les gens qui sont plus pauvres et encore beaucoup plus pauvres ne souffrent pas comme ça. Si vous vous rendez en Asie vous trouverez des personnes beaucoup plus pauvres mais ils sont capables de rire, de s’amuser toute la journée. On ne peut pas apaiser les gens avec la promesse de l’argent. On a vraiment besoin d’une dimension spirituelle, pas exactement de l’argent, pour ces communautés-là ; l’argent c’est bien, mais seulement l’argent sans la dimension spirituelle, cela n’aide pas beaucoup. Ce n’est pas avec des millions et des millions d’euros que l’on peut résoudre le problème. Non, ce n’est pas avec la punition et la menace que l’on peut résoudre le problème. Il faut la pratique spirituelle. Et parler, écouter, parler bien, écouter bien, c’est déjà la pratique spirituelle très profonde. Et nos dirigeants doivent savoir le faire. Ecrivez à votre Président. Ecrivez à votre Premier Ministre, et suggérez la pratique.
Même dans la pauvreté on peut s’aimer, on peut se rendre heureux, on peut vivre une vie simple. Mais si la fraternité est là, on ne souffre plus, même avec la pauvreté. L’homme est une créature sociale. L’homme ne peut pas vivre seul, il faut vivre avec les autres hommes. On ne peut pas être heureux en vivant seul dans la forêt, dans une montagne. Il faut vivre avec les autres femmes, les autres hommes. Donc la présence de l’autre personne c’est le cadeau le plus grand pour l’homme. C’est la richesse, la plus grande richesse pour l’homme. Et c’est Karl Marx qui a dit cela ; il a dit que même dans la pauvreté, s’il y a cette fraternité, alors l’autre personne constitue le bonheur. Alors la fraternité est très importante. La fraternité ne se fait pas avec de l’argent, cela se fait avec la pratique spirituelle. Dans une communauté on doit fabriquer la fraternité, et cela va nous nourrir, nous guérir. Dans ma lettre au Président du Vietnam j’ai dit que si dans le parti on souffre, si dans la population on souffre, c’est parce que l’on a compté trop sur le développement économique. On a négligé la dimension spirituelle. On doit vivre sa vie en telle sorte que la fraternité puisse être générée, régénérée. Au commencement de la révolution il y avait beaucoup de fraternité, mais comme on continue à lutter, on ne pratique pas la spiritualité, donc il y a de la division, de la concurrence, l’élimination entre les partis, entre les gens qui vivent dans un parti politique. Non seulement dans le parti communiste mais dans les autres partis aussi. Alors il n’y a pas assez de fraternité. Si vous êtes dirigeant d’un parti politique, alors songez-y : il faut une dimension spirituelle à votre parti. Sinon, vous ne pouvez pas être forts et unis. Et j’ai proposé au Président du Vietnam d’organiser des séances de pratique, pour que tous les dirigeants puissent avoir une chance d’apprendre l’art de pratiquer la spiritualité, la fraternité. Si vous êtes français, vous pouvez faire la même chose avec votre Président. Parler de la fraternité, ce n’est pas assez. Il faut pratiquer la fraternité. La fraternité se fait, se pratique avec le langage aimant et l’écoute profonde.
C’est la quinzième journée déjà et la violence continue même avec une force de police énorme, et beaucoup d’entre nous ne peuvent pas dormir tranquillement tant que le malaise continue, et nous n’avons pas de voie pour pouvoir sortir de la situation. Songez-y, ce ne sont pas seulement le problème, la difficulté des Jeunes, mais la difficulté du monde. Il faut commencer par soi-même, démanteler la violence en soi pour pouvoir communiquer avec les autres, afin de pouvoir aider les autres à faire la même chose. Et l’enseignement du Bouddha est très concret. On peut déjà commencer avec la respiration consciente, avec la reconnaissance de la souffrance en soi, dans l’autre, et avec la pratique de la communication. Comme cela nous allons pouvoir dormir mieux ce soir et demain.