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« Le degré de spiritualité n'a rien à voir avec ce en quoi vous croyez,  mais tout à voir avec votre état de conscience. »   Eckhart TOLLE 

                                                                              
Jiddu KRISHNAMURTI


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« Si nous éveillons la beauté créative en nous, elle s’exprime au dehors, et alors l’ordre est là. »

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     (Le texte ci-dessous est un extrait de la biographie parue sur le  site Krishnamurti France)

   Jiddu Krishnamurti est issu d’une famille de brahmanes parlant le Télougou. Son père, Jiddu Narianiah, était un fonctionnaire de l’administration britannique coloniale. Ses parents, cousins au second degré, eurent onze enfants au total, dont seulement six survécurent. Ils étaient végétariens stricts, évitant même de manger les œufs et jetant toute nourriture qui « aurait croisé l’ombre d’un anglais ». 

   Il est né le 12 mai 1895 (11 mai selon le calendrier brahmane), dans la petite ville de Madanapalle dans le district de Chittor en Andra Pradesh à environ 150 miles (250 km) au nord de Madras (maintenant Chennai).

   En 1903, la famille s’est installée dans le Cudappah où Krishnamurti avait contracté la malaria lors d’un séjour précédent, une maladie dont il aurait à souffrir d’accès récurrents durant de nombreuses années. C’était un enfant sensible et maladif ; « dans la lune et rêveur », il fut souvent considéré comme mentalement retardé , et fut régulièrement battu à l’école par ses professeurs et à la maison par son père. Dans les mémoires qu’il écrivit à l’âge de dix huit ans, il décrit aussi des expériences « psychiques », ayant « vu » sa sœur après sa mort en 1904, ainsi que sa mère qui est morte en 1905 quand il avait dix ans.
 

   Narianiah le père de Krishnamurti, prit sa retraite à la fin de 1907, et, ayant des moyens limités, écrivit à Annie Besant, alors présidente de la Société Théosophique, pour chercher un emploi au domaine des 260-acre, siège social de la Théosophie à Adyar. (Bien que brahmane orthodoxe et observant, Narianiah avait été membre de la Société Théosophique depuis 1882). Il fut par la suite engagé par la Société comme secrétaire, et sa famille y emménagea en janvier 1909.

   Ce fut quelques mois après le dernier déménagement que Krishnamurti fut trouvé par le grand occultiste et théosophe de haut rang C.W.Leadbeater, aux prétentions de clairvoyance. Pendant ses incursions à la plage du domaine Théosophique, sur le fleuve jouxtant Adyar, Leadbeater avait remarqué Krishnamurti, (qui fréquentait aussi la plage avec les autres), et fut stupéfié par la « plus merveilleuse aura qu’il ait jamais vue, dépourvue de toute particule d’égoïsme ». Cette impression forte existait malgré l’apparence extérieure de Krishnamurti, qui, selon des témoins oculaires, était assez commune, quelconque, et négligée. Le garçon était aussi considéré comme « particulièrement simplet » ; il avait souvent « une expression vide » qui « lui donnait un regard presque abruti ». Leadbeater resta fermement convaincu que le garçon deviendrait un grand enseignant.

  Au sujet de son enfance, Krishnamurti écrivit dans son journal : « Aucune pensée n’est entré dans son esprit. Il observait et écoutait et rien d’autre. La pensée avec ses associations n’a jamais pris place. Il n’y avait aucune fabrication d’image. Il a souvent essayé de penser mais aucune pensée ne venait. » 

   Après la « découverte », Krishnamurti fut placé sous l’aile de la direction de la Société Théosophique de Adyar et de son cercle intérieur. Leadbeater et un nombre restreint d’associés de confiance furent chargés d’éduquer, de protéger, et plus généralement de préparer Krishnamurti comme le « véhicule » de « l’Instructeur du Monde » attendu. 

   Plus tard en 1911, une nouvelle organisation appelée l’Ordre de l’Etoile fut établie par la direction Théosophique afin de préparer le monde à la « venue » annoncée. Krishnamurti fut nommé à sa tête, avec des Théosophes aînés à diverses positions. L’adhésion était ouverte à quiconque acceptait la doctrine de la venue de l’ « Instructeur du monde ».  La polémique éclata peu après, à la fois à l’intérieur de la Société Théosophique et en dehors, dans les cercles Hindous et la presse indienne.

   Krishnamurti (ou Krishnaji comme on l’appelait souvent) et son plus jeune frère Nitya furent pris en tutorat à titre privé dans l’enceinte Théosophique de Madras, et plus tard furent emmenés vers une vie comparativement opulente dans un cercle de la haute société européenne afin de terminer leur éducation. Pendant toute cette période, Krishnamurti a développé un lien fort avec Annie Besant, une relation mère-fils de substitution. Son père, repoussé à l’arrière plan par le remous d’intérêt autour de Krishnamurti, a poursuivi la Société Théosophique en 1912 pour protéger ses intérêts parentaux. Après une bataille légale prolongée, Besant prit la garde légale de Krishnamurti et de son frère Nitya.  En raison de cette séparation de sa famille et de sa maison, Krishnamurti et son frère devinrent extrêmement proches, et dans les années suivantes ils voyagèrent souvent ensemble. 

   Mary Lutyens, dans sa biographie de Krishnamurti, déclare qu’il y eut un temps où il a entièrement cru qu’il devait devenir l’« Instructeur du Monde », après un soutien et une éducation correctes dans les domaines spirituels et séculaires. Un autre biographe décrit le programme quotidien qui lui fut imposé par Leadbeater et ses associés, qui incluait entre autres des exercices sportifs rigoureux, des cours particuliers dans de nombreuses matières scolaires, des leçons théosophiques et religieuses, le yoga et la méditation, ainsi que l’instruction de l’hygiène et des bonnes manières de la société et de la culture britanniques. À la différence des sports, où il a montré une aptitude naturelle, Krishnamurti a toujours eu des problèmes avec le formalisme scolaire et n’avait aucun penchant académique. Il a finalement abandonné l’éducation universitaire après plusieurs tentatives d’admission. Il apprit des langues étrangères, parvenant à parler plusieurs d’entre elles (le Français et l’Italien entre autres) avec une certaine maîtrise. 

   Durant cette période, il a apparemment apprécié la lecture de passages de l’Ancien Testament, et a été impressionné par certains des classiques occidentaux, particulièrement Shelley, Dostoïevski et Nietzsche. Il avait également, depuis l’enfance, des aptitudes considérables pour l’observation et la mécanique, pouvant correctement démonter et remonter des mécanismes complexes. 

   En 1922, Krishnamurti et Nitya voyagèrent de Sydney à la Californie en passant par la Suisse. En Californie, ils logèrent dans une maison située dans une vallée reculée près d’Ojai, qui leur fut prêtée pour l’occasion par un américain membre de l’Ordre de l’Etoile. Finalement un groupe de sympathisants l’acquirent pour lui avec la propriété environnante, qui devint désormais le domicile officiel de Krishnamurti. 

   C’est à cet endroit, en août 1922, que Krishnamurti est passé par une intense expérience qui a transformé sa vie. Elle a été simultanément et invariablement caractérisée comme un éveil spirituel, une transformation psychologique, et un « conditionnement » physique. Krishnamurti et ses proches l’appelèrent « le processus », qui continua de se produire fréquemment avec une intensité variable jusqu’à sa mort. Les témoins rapportent qu’il a commencé à l’âge de 17 ans, avec une douleur extraordinaire et un gonflement dur comme une balle à la nuque et au cou. Les deux jours suivants, les symptômes s’aggravèrent, avec l’augmentation de la douleur, un malaise et une sensibilité physique extrême, et des divagations délirantes occasionnelles. Puis il parût sombrer dans l’inconscience ; en réalité, il a raconté qu’il était très conscient de son environnement et que pendant cet état, il eût une expérience « d’union mystique ». Le jour suivant, les symptômes, et l’expérience, s’accrurent, culminant avec un sens « de paix immense ».
 

   « ... J’étais suprêmement heureux, parce que j’avais vu. Rien n’a pu jamais être identique. J’ai bu à l’eau pure et claire et ma soif a été apaisée. ... J’ai vu la Lumière. J’ai touché la compassion qui guérit toute peine et toute souffrance ; ce n’est pas pour moi-même mais pour le monde. ... L’amour dans toute sa gloire a intoxiqué mon cœur ; mon cœur ne pourra jamais se refermer. J’ai bu à la fontaine de la Joie et de l’éternelle Beauté. Je suis intoxiqué de Dieu. »
 

   Des incidents semblables ont continué avec des interruptions courtes jusqu’à octobre, et ont repris plus tard régulièrement, toujours impliquant, à divers degrés, des douleurs physiques pour marquer le début du « processus », accompagné par ce qui est décrit, de manière variable, comme « présence », « bénédiction », « immensité », et « caractère sacré », qui, selon certaines informations, a souvent été, « ressenti » par les personnes présentes. 

   Plusieurs explications ont été proposées pour les évènements de 1922, et le « processus » en général. Leadbeater et d’autres théosophes, bien qu’ils se soient attendus à ce que le « véhicule » ait certaines expériences paranormales, furent radicalement déconcertés face aux développements de l’ensemble du phénomène et devant une impasse pour l’expliquer. Le « processus », et l’incapacité de Leadbeater de l’expliquer de manière satisfaisante, eurent d’autres conséquences si l’on en croit le biographe R.Vernon : 

   Le processus d’Ojai, quelque soit sa cause ou sa validité, fut une étape importante et bouleversante pour Krishna. Jusqu’à ce moment son progrès spirituel, aussi bien quadrillé que possible, avait été planifié par délibération solennelle des sommités de la Théosophie. … Quelque chose de nouveau s’était maintenant produit pour lequel la formation de Krishna ne l’avait pas entièrement préparé. … Un fardeau fut enlevé de sa conscience et il fit son premier pas vers l’individualité. … Dans la perspective de son futur rôle d’instructeur, le processus constitua sa fondation. … Il était venu à lui tout seul et n’avait pas été planté en lui par ses mentors… il fournissait à Krishna le sol dans lequel son esprit de confiance et d’indépendance récemment découvert pourrait prendre racine. 

   Finalement, la mort inattendue de son frère Nitya le 11 novembre 1925 à l’âge de 27 ans, de tuberculose, après une longue maladie, choqua fondamentalement la croyance et la foi de Krishnamurti en la Théosophie et les dirigeants de la société théosophique.  D’après les témoins, la nouvelle le « brisa complètement ». Il lutta pendant des jours pour surmonter sa douleur, ce qui aboutit « ...à passer par « une révolution intérieure, à trouver une force nouvelle ». L’expérience de la mort de son frère détruisit toutes les illusions restantes, et les choses ne seraient plus jamais les mêmes...
 

   « Il n’y a rien là de tellement extraordinaire puisque je ne veux pas de disciples et je tiens à le dire. Dès le moment où l’on suit quelqu’un, on cesse de suivre la Vérité. Je ne me préoccupe pas de savoir si vous faites attention ou non à ce que je dis. Je veux faire une certaine chose dans le monde, et je la ferai avec une invariable concentration. Je ne me préoccupe que d’une seule chose essentielle : libérer l’homme. Je désire le libérer de toutes les cages, de toutes les peurs, et non pas fonder des religions, de nouvelles sectes, ni établir de nouvelles théories et de nouvelles philosophies. »...

    De 1930 à 1944, Krishnamurti se consacra à parler au cours de voyages et à éditer des publications sous l’auspice du « Star Publishing Trust » (SPT) qu’il avait fondé avec son proche collaborateur et ami de l’Ordre de l’Etoile, D. Rajagopal. La base des opérations pour la nouvelle entreprise était à Ojai, où Krishnamurti, Rajagopal, et la femme de Rajagopal, Rosalind Williams Rajagopal, résidaient dans la maison connue sous le nom de « Arya Vihara ». Les affaires et les aspects d’organisation du SPT étaient administrés principalement par D. Rajagopal pendant que Krishnamurti consacrait son temps à parler et à méditer. Tout au long des années 30, Krishnamurti parla en Europe, en Amérique latine, en Inde, en Australie et aux Etats-Unis. 

   En 1938, Krishnamurti fit la connaissance d’Aldous Huxley, qui était arrivé d’Europe en 1937. Ils amorcèrent une longue amitié qui dura de nombreuses années. Ils partagèrent des préoccupations communes concernant le conflit imminent en Europe qu’ils considéraient comme le résultat de l’influence pernicieuse du nationalisme...

   Krishnamurti continua de parler à travers le monde, dans des conférences publiques, des discussions de groupe et avec des personnes intéressées. Vers la fin de 1980, il réaffirma les éléments de base de son message dans une déclaration écrite qui finit par être considérée comme l’ « Essence de l’Enseignement ». En voici un extrait : 

   « L’Essence de l’enseignement de Krishnamurti est contenu dans la déclaration qu’il fit en 1929 où il dit : La vérité est un pays sans chemin. L’homme ne peut venir à elle par aucune organisation, par aucune foi, par aucun dogme, prêtre ou rituel, ni par aucune connaissance philosophique ou technique psychologique. Il doit la trouver à travers le miroir de la relation, par la compréhension du contenu de son propre esprit, par l’observation, et non par l’analyse intellectuelle ou la dissection introspective. L’homme a construit en lui-même des images pour améliorer son sentiment de sécurité - religieuse, politique, personnelle. Celles-ci se manifestent comme symboles, idées, croyances. Leur fardeau domine la pensée de l’homme, ses relations et sa vie quotidienne. Ce sont les causes de nos problèmes car ils séparent l’homme de l’homme dans toutes les relations. » 

   En avril 1985 il parla lors d’une audience des Nations Unies à New York, où il lui fut attribué la médaille de la Paix des Nations Unies pour 1984.
 

   En novembre 1985 il visita l’Inde pour la dernière fois, en donnant un certain nombre de ce qui fut appelé des entretiens et discussions « d’adieu » entre cette date et janvier 1986. Ces derniers entretiens incluaient les questions fondamentales qu’il avait posées tout au long des années, aussi bien que des préoccupations plus nouvelles liées aux avancées récentes de la science, la technologie, et la manière dont elles ont affecté l’humanité. Krishnamurti avait expliqué aux amis qu’il ne souhaitait pas inviter la mort, mais qu’il n’était pas sûr du temps que durerait son corps (il avait déjà perdu un poids considérable), et une fois qu’il ne pourrait plus parler, il n’aurait « aucun autre but ». Dans son dernier entretien, le 4 janvier 1986, à Madras, il invita encore l’assistance à examiner avec lui la nature de l’enquête, l’effet de la technologie, la nature de la vie et de la méditation, et la nature de la création : 

   … Ainsi, nous enquêtons sur ce que fait un oiseau. Quelle création y a-t-il derrière tout ceci ? Est-ce que vous m’attendez pour la décrire, pour entrer en elle ? Vous voulez que je pénètre en elle ? Pourquoi [(depuis l’assistance : Pourquoi comprendre ce qu’est la création)]. Pourquoi demandez-vous cela ? Parce que je l’ai demandé ? Aucune description ne peut jamais décrire l’origine. L’origine est inconnue ; l’origine est absolument tranquille, elle ne vrombit pas en faisant du bruit. La création est quelque chose qui est des plus saint, c’est la chose la plus sacrée dans la vie, et si vous avez fait un désordre de votre vie, changez la. Changez la aujourd’hui, pas demain. Si vous êtes incertain, découvrez pourquoi et soyez certain. Si votre pensée n’est pas droite, pensez directement, logiquement. À moins que tout cela soit préparé, que tout cela soit arrangé, vous ne pourrez pas entrer dans ce monde, dans le monde de la création.  

  Krishnamurti fut également préoccupé par son héritage, par le fait d’être inconsciemment transformé en une certaine personnalité dont les enseignements « auraient été remis » à des individus spéciaux, plutôt qu’au monde dans son ensemble. Il voulut que personne ne se posât en « interprète » de l’enseignement. Il avertit ses proches à plusieurs occasions qu’ils ne devaient pas se présenter comme porte-paroles en son nom, ou comme ses successeurs après sa mort. 

   Quelques jours avant sa mort, dans une dernière communication, il déclara catégoriquement que « personne » parmi ses proches, ou le grand public, n’avait compris ce qui lui était arrivé (comme messager de l’enseignement), ni n’avaient compris l’enseignement lui-même. Il ajouta que l’« immense énergie » fonctionnant dans sa vie s’en irait avec sa mort, soulignant encore l’impossibilité d’un successeur. Cependant, il offrit de l’espoir en déclarant que les gens pourraient approcher cette énergie et obtenir la compréhension dans une certaine mesure « … s’ils vivent les enseignements ». Au cours de discussions antérieures il s’était comparé à Thomas Edison, suggérant qu’il avait effectué le plus dur du travail, et que tout ce que les autres avaient maintenant besoin de faire c’était d’appuyer sur un bouton. Dans un autre exemple il parla de Colomb accomplissant le voyage d’une traversée laborieuse à la découverte du Nouveau Monde, tandis que maintenant, on pouvait facilement s’y rendre en avion ; la suggestion ultime étant que même si Krishnamurti était d’une certaine manière « spécial », les autres n’avaient pas besoin de l’être, afin de parvenir à son niveau de compréhension. 

   J. Krishnamurti est mort le 17 février 1986, à l’âge de 91 ans, du cancer du pancréas. Ses restes furent incinérés et dispersés par des amis et d’anciens proches dans les trois pays où il avait passé la majeure partie de sa vie ; L’Inde, l’Angleterre et les Etats-Unis d’Amérique.