Antidisturbios, saison1, film de Rodrigo Sorogoyen, commentaire

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Antidisturbios, 
    Saison 1,     2020, 
 
de : Rodrigo  Sorogoyen, 
 
  avec : Vicky Luengo, Raúl Arévalo, Álex García, Hovik Keuchkerian, Roberto Álamo, Raúl Prieto,
 
Musique : Olivier Arson

 
  Ne pas lire avant d'avoir vu la série.

 
Une unité de police anti-émeutes madrilène, Puma 93, est chargée d'exécuter un ordre du juge Contreras et de procéder à l'expulsion d'un couple. Salvador Osorio (Hovik Keuchkerian), chef du groupe, arrive dans l'immeuble avec cinq hommes et se rend compte qu'une trentaine de personnes sont venues soutenir les deux expulsés. Salvador souhaiterait annuler l'intervention, car aucune équipe n'est disponible pour leur prêter main forte. Mais le juge insiste. Au cours de l'assaut, un jeune Sénégalais se tue accidentellement... 
 
 Le premier épisode, presque entièrement consacré au processus d'expulsion, est un modèle de maîtrise narrative et visuelle. Le spectateur a l'impression d'être au milieu de la mêlée et de suivre les évènements à travers des GoPro fixées sur chaque intervenant. La tension qui monte progressivement, aussi bien parmi les résistants que parmi les membres du groupe d'intervention, est aussi palpable et crispante que si nous participions à cette mission avec la peur au ventre. Une fois le drame survenu, le calme revient dans le monde physique, mais se gonfle dans le psychisme des participants. Le service des affaires internes, dirigé par Diana (Mónica López) et son second Moreno (Tomás del Estal), est missionné pour comprendre ce qui s'est réellement passé. Dès lors, c'est une succession permanente d'angoisses et de soulagements qui bouscule la vie intime des six policiers. Car, bien évidemment, tout n'est pas franchement noir ou blanc dans le processus qui s'est terminé tragiquement. La caméra, toujours très mobile, suit chacun des membres du groupe dans leurs vies de famille, dans leurs tentatives d'échapper aux sanctions, avec une justesse qui ne connaît aucune faiblesse. Les maîtres mots de cette saison sont : authenticité et réalisme. Aucun manichéisme dans cette analyse minutieuses des tempéraments individuels et des tentatives de manipulations libératoires. Chaque épisode porte le nom de l'un des intervenants. Mais le véritable fil conducteur de l'histoire est Laia (Vicky Luengo), jeune enquêtrice de la police des polices, obsédée par la vérité quelle qu'elle soit (la scène d'ouverture annonce la couleur de son tempérament d'emblée), qui découvre peu à peu les dessous d'une affaire qui est loin d'afficher la simplicité d'une bavure policière banale. Toujours fidèle à sa ligne de véracité et à son refus de tous rebondissements spectaculaires ou gratuits, le récit se clôt dans un marchandage odieux qui laisse un goût pour le moins amer. Il n'empêche que le dernier épisode donne la fâcheuse impression, peut-être illusoire, d'un essoufflement de la dramaturgie. Le choix de l'authenticité n'est pas toujours compatible avec le désir d'une justice franche et pure... 
   
Bernard Sellier