Après la pluie, film de Takashi Koizumi, commentaire

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Après la pluie,
      (Ame agaru),     1999, 
 
de : Takashi  Koizumi, 
 
  avec : Akira Terao, Yoshiko Miyazaki, Shiro Mifune,
 
Musique : Masaru Sato

   
 
Pour cause de pluies violentes et interminables, un certain nombre de voyageurs sont bloqués dans une auberge de campagne, au bord d'un fleuve, le bac étant inutilisable. Le plus remarquable parmi eux est un Samouraï, Ihei Misawa (Akira Terao). Toujours souriant, calme, il en impose à son entourage. Un jour, alors qu'il se promène dans la campagne, il intervient pour faire cesser un duel. Le Seigneur du fief, Nagai Izuminokami Shigeaki (Shiro Mifune), ayant observé la scène, remercie Ihei de son intervention et lui propose le poste de maître d'armes, vacant depuis peu. Mais les anciens ne l'entendent pas de cette oreille et voient d'un fort mauvais oeil un inconnu occuper la place qui revient à l'un d'eux... 
 
 Nous sommes bien loin des boucheries sanglantes et répétitives de "La Princesse du désert", ou des duels-pirouettes fantasmagoriques de "Tigre et Dragon", même si le personnage principal est un Samouraï. Surprenant héros, d'ailleurs que ce Ihei, au visage étrangement bonnasse, qui paraît tout d'abord falot, inconsistant, puis installe petit à petit sa maîtrise sereine. Si l'on excepte, d'ailleurs, un ou deux combats, qui flirtent avec l'abstraction, toute l'œuvre repose sur une évolution intérieure tellement subtile qu'elle semble, à nous Occidentaux agités du mental, singulièrement ésotérique. D'autant plus que le refoulement de toute émotion (surtout évident pour la femme du Samouraï, qui passe toutes ses journées à genoux, en travaux d'aiguille) ne facilite pas l'harmonisation avec ce monde étranger. Seul le Seigneur, qui, à chaque parole prononcée, semble cracher des balles de mitraillette, tranche avec la douceur ambiante. Pour jouir pleinement de sa présence, il est indispensable de faire table rase des raisonnements, des attentes, des références connues. A ce moment-là, peut-être est-il possible d'entrer en communion avec cette créature hors du temps, ces codes de l'honneur propres à la civilisation nippone, et de goûter pleinement le calme qui s'étend sur les paysages et dans l'intimité des personnages, jusqu'à une conclusion étonnamment elliptique. Cette adhésion nécessite cependant de surmonter l'ennui qui, parfois, n'est pas loin de décourager les bonnes volontés.
   
Bernard Sellier