L'aventure, c'est l'aventure, film de Claude Lelouch, commentaire

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L'aventure, c'est l'aventure,
       1972, 
 
de : Claude  Lelouch, 
 
  avec : Lino Ventura, Jacques Brel, Charles Gérard, Aldo Maccione, Nicole Courcel, Charles Denner,
 
Musique : Francis Lai


 
Lire le poème ( CinéRime ) correspondant : ' Reconversion '

 
Cinq petits truands, qui oeuvrent dans des catégories différentes, se rencontrent et décident de travailler ensemble. Il y a Lino Massaro (Lino Ventura), voleur de tableaux ; Simon Duroc (Charles Denner), dérobeur de pneus et "névropathe cyclique" ; Charlot (Charles Gérard, arnaqueur à l'essence : Aldo (Aldo Maccione), qui ne résiste pas aux petites voitures, mais grille les "stop" ; et Jacques (Jacques Brel), qui fait du trafic d'armes en avion. Mais, comme dans toutes les professions, il est indispensable de se reconvertir périodiquement. C'est ce que va proposer à ses coéquipiers, Simon, le théoricine du groupe... 
 
 C'est un bonheur toujours renouvelé que de retrouver les cinq compères dans ce classique. Certes, l'aspect post soixante-huitard paraît aujourd'hui passablement démodé, d'autant plus que le réalisateur, volontairement bien sûr, ne travaille pas dans la finesse, mais dans le gros rouge qui frappe et tache. Mais, si l'on prend ce film pour ce qu'il est, c'est-à-dire une gigantesque farce, hyper-caricaturale, entre potaches trentenaires, il devient un véritable régal.  
 
 Les tics de Lelouch et ses séquences pseudo improvisées (l'accident de Lino et ses échanges en italien avec Aldo, la leçon d'anglais entre Lino et Charlot, le détournement du Boeing grâce à un Belge à l'inénarrable accent, le cours de marche et de drague façon Aldo...), passent ici à merveille, sans encombrer la narration, et se montrent souvent jouissives, grâce à leur relative brièveté. Même si l'ensemble se moque ouvertement de la politique "politicienne", des mouvements extrémistes, c'est la pochade et le délire qui prennent toujours le pas sur la critique. Cela nous vaut de nombreuses scènes d'anthologie : le défilé des personnalités formatrices (des Maoïstes aux Fascistes, en passant par un Général et un Boufddhiste, le tout synthétisé génialement par Simon, l'intello (il faut devenir les spécialistes de la clarté dans la confusion"...!) ; la scène de torture et le rapt de Ernesto Juarez (Juan-Luis Bunuel), et sa "vente" simultanée à trois groupes ennemis, suivie à la jumelle, paris à la clé, par les compères ; l'arrivée en terre africaine... Tout cela fait un peu désordonné, fabriqué à l'inspiration du moment, et ressemble plus à une juxtaposition de moments craquants qu'à une véritable trame romanesque. Il n'en reste pas moins que la complémentarité des personnalités fait merveille et que, hormis deux ou trois petites baisses de régime, Lelouch livre là une comédie aussi débridée qu'hilarante. Quant aux "pensées profondes" des différents protagonistes, qui oscillent entre le n'importe quoi et l'anarchisme bon enfant, il en est au moins une sur laquelle chacun pourrait méditer utilement (c'est Jacques qui la lance à son arrivée en Afrique : " Le chemin le plus court pour aller de la barbarie à la décadence passe par la civilisation" ) !
   
Bernard Sellier