BAC nord, film de Cédric Jimenez, commentaire

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BAC nord,
         2020, 
 
de : Cédric  Jimenez, 
 
  avec : Gilles Lellouche, Karim Leklou, François Civil, Adèle Exarchopoulos, Kenza Fortas, Michaël Abiteboul,
 
Musique : Guillaume Roussel

  
 
Marseille. Gregory Cerva (Gilles Lellouche), Antoine (François Civil) et Yass (Karim Leklou) travaillent pour la BAC nord. Leur quotidien est fait de petites arrestations et de beaucoup de frustrations. Lorsque l'indic d'Antoine, Amel (Kenza Fortas), les prévient qu'une grosse livraison doit avoir lieu quelques jours plus tard, ils décident de monter une opération d'envergure. Mais Amel se fait payer pour ses infos avec de la drogue qu'il faut trouver...
 
 Le film peut être considéré comme un quasi documentaire pour plusieurs raisons. D'abord parce qu'il relate une affaire qui a défrayé la chronique en 2012, avec jugement en 2021. Dix-huit policiers avaient été accusés de vol d’argent ou de drogue à des dealers. Les peines de prison pour certains d'entre eux ont été légères et assorties de sursis. Ensuite, parce que le réalisateur a opté pour une reconstitution ultra réaliste des interventions, filmées avec une maestria et une lisibilité exceptionnelles. La psychologie des personnages n'a quasiment aucune place. Seules comptent les actions et les lourdes conséquences de celles-ci.

 Le drame dresse un état des lieux sombre, pessimiste, et sans concession, avec deux univers qui s'affrontent : d'un côté les caïds des cités qui font la loi sur leur territoire et imposent des frontières infranchissables aux autorités. De l'autre des flics condamnés à faire de la figuration et à se rabattre sur l'arrestation de petits délinquants pour satisfaire la hiérarchie et «atteindre leur chiffre» de la journée. Autant dire qu'il n'y a pas de solution praticable pour endiguer le fléau de la drogue, à moins de convoquer l'armée pour mettre tous les truands au pas, ce qui n'est pas encore d'actualité. Aucun jugement n'est porté sur les policiers qu'une vision extérieure superficielle pourrait effectivement qualifier de «ripoux». La question qui se pose est simple : est-il possible d'utiliser des méthodes illégales pour provoquer le démantèlement d'un trafic important ? Mais la réponse est plus que difficile. Gilles Lellouche mène tambour battant cette opération à haut risque, parfaitement épaulé par François Civil et Karim Leklou. Le réalisme est présent à tous les niveaux, y compris dans les échanges verbaux, dont on perd une bonne partie, tant l'articulation (surtout chez Karim Leklou) est souvent déficiente. Mais ce n'est pas un handicap, puisque les dissertations psychologiques ou philosophiques ne sont pas de la partie. Dans le genre, une réussite indéniable.
   
Bernard Sellier