Beaumarchais, l'insolent, film de Edouard Molinaro, commentaire

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Beaumarchais, l'insolent,
    1996,  
 
de : Edouard  Molinaro, 
 
  avec : Fabrice Luchini, Sandrine Kiberlain, Jean Yanne, Manuel Blanc, Michel Aumont, Jean-François Balmer, Isabelle Carré, Judith Godrèche,
 
Musique : Jean-Claude Petit


 
Lire le poème (CinéRime) correspondant : ' Bel esprit '

 
1775. Le règne de Louis XV (Michel Serrault) se termine. Monsieur de Beaumarchais (Fabrice Luchini) tente de faire jouer ses pièces tout en préparant des pamphlets contre la corruption du Parlement et en troussant les demoiselles qui se présentent. Il prend à ses côtés, comme chroniqueur, le jeune Gudin (Manuel Blanc) qui lui est envoyé par Voltaire... 
 
 Quelle distribution ! Edouard Molinaro a réussi à concentrer dans son film tout le gratin du cinéma et du théâtre français. Et pour quel résultat ! Une histoire décousue, composée de minuscules saynètes inconsistantes, mises bout à bout sans aucun sens de la progression, du rythme, de l'intensité comique ou dramatique, et, même sans logique, au point que certains passages semblent arriver comme un cheveu sur de la soupe. On passe des problèmes théâtraux à un procès, puis à une vague histoire d'amour pour foncer dans une aventure londonienne d'espionnage, bifurquer sur une aide aux Américains, une rencontre éclair avec Benjamin Franklin sortant de son bain... Tout cela emboîté à la "va comme je te pousse", sans l'ombre d'un approfondissement ou même d'une joyeuse folie qui aurait agréablement pallié la superficialité du propos. Fabrice Luchini survole sans passion, avec une désinvolture qui ressemble parfois fort à de l'indifférence, ce personnage bien falot qui tient du pantin opportuniste, et virevolte en tous sens dans des piécettes sans envergure ni intérêt.  
 
 On en est alors réduit à attendre les apparitions, quelquefois rachitiques, de tous ces merveilleux acteurs qui passent le temps d'un mot ou d'un geste, si rapidement qu'il est parfois difficile de les reconnaître : tiens, Jean-Claude Brialy en religieux ; ah, Dominique Besnehard en Louis XVI zézayant ; Michel Piccoli en Prince de Conti ; Jacques Weber en Duc de Chaulnes, vif du jarret et de l'épée ; tiens, Claire Nebout en Chevalier d'Eon, une bonne idée ; et puis Martin Lamotte, Guy Marchand, Alain Chabat, José Garcia, Isabelle Carré, Evelyne Bouix, Marc Dudicourt, Murray Head, Patrick Bouchitey... bref, une avalanche artificielle autant qu'inutile de talents, qui ne donne naissance qu'à une oeuvre éclatée, futile, sans grâce ni, ce qui est sans doute le plus grave pour un récit consacré à l'un de nos grands auteurs, sans la moindre poésie. Les dialogues sont ternes, les raccourcis scénaristiques frustrants, les situations médiocrement exploitées, et quelquefois à la limite de l'aberration logique.  
 
 Les vingt dernières minutes se recentrent quelque peu et apportent une petite compensation théâtrale mais, dans l'ensemble, c'est prétentieux, compassé et, pis que tout, ennuyeux. En un mot, un triste gâchis !
   
Bernard Sellier