Béliers, film de Grímur Hákonarson, commentaire

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Béliers,
       (Hrútar),         2015, 
 
de : Grímur  Hákonarson, 
 
  avec : Sigurður Sigurjónsson, Theodór Júlíusson, Charlotte Bøving, Jon Benonysson, Gunnar Jónsson,
 
Musique : Atli Örvarsson

  
 
La lande islandaise. Dans un coin retiré, vivent deux frères, Gummi (Sigurður Sigurjónsson) et Kiddi (Theodór Júlíusson), qui ne se sont pas adressé la parole depuis quarante ans. Tous deux vivent, comme la plupart de leurs compatriotes, de l'élevage de moutons. Lors d'un concours de béliers, Gummi se voit surclassé par Kiddi, et en éprouve beaucoup de dépit. Il fait savoir à la jeune vétérinaire Katrin (Charlotte Bøving) que l'animal présenté par son parent est peut-être victime de la "tremblante", une maladie potentiellement mortelle pour les moutons... 
 
 Primé à Cannes, dans la catégorie "Un certain regard", ce film se démarque nettement du tout venant de la production cinématographique courante. Tout d'abord par son sujet qui n'est pas, a priori, très captivant. Tout au moins sur le papier. Car même si le spectateur lambda ne se passionne pas pour l'élevage des moutons, l'atmosphère à la fois paisible et conflictuelle qui baigne l'histoire ne tarde pas à provoquer un intérêt qui, très progressivement, se métamorphose en empathie pour ces personnalités rudes, autarciques, aussi têtues que leurs béliers, dont on ignore totalement le passé responsable de l'enfermement dans cette haine mutuelle viscérale. Ensuite par la simplicité brute de son approche, qui se révèle en osmose juste avec la rigueur du climat, l'austérité des tempéraments, et l'aridité du sol. Enfin il est impossible de ne pas souligner la qualité de l'incarnation de ces deux vieillards, plus vrais que nature tant par leur physique rustaud que par leur sécheresse verbale et psychologique. Cerise sur le gâteau, quelques pointes humoristiques, aussi judicieuses que réjouissantes (les deux frères communiquent au moyen du chien de Kiddi) apportent leur fines touches de piment discret à cette épreuve intimiste qui se clôt sur une scène d'une poignante sobriété.
   
Bernard Sellier