La Belle Verte, film de Coline Serreau, commentaire

  Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

La belle verte,
      1996,  
 
de : Coline  Serreau, 
 
  avec : Coline Serreau, Vincent Lindon, Marion Cotillard, James Thierrée, Claire Keim, Paul Crauchet,
 
Musique : Coline Serreau


 
Lire le poème (CinéRime) correspondant : ' Descente aux enfers '

 
Une réunion inter-planètes a lieu sur une montagne d'un astre lointain. Divers messagers sont envoyés sur d'autres planètes pour diverses missions, mais personne ne veut aller sur la terre qui n'a pas été visitée depuis plus de deux cents ans. La civilisation y est beaucoup trop arriérée ! Mila (Coline Serreau) dont la mère était terrienne, décide de se porter volontaire. Elle atterrit à Paris et découvre le monde contemporain avec stupéfaction... 
 
 Voilà le type de film que tout humaniste est prêt à aimer, que tout amoureux de l'écologie est prêt à défendre, dont les intentions sont on ne peut plus louables, et dont le résultat porte, à mon sens bien sûr, aux limites de l'agacement. Tout se passe comme si la réalisatrice (et scénariste) avait fait un listing de toutes les aberrations (bien réelles) de notre société (pollution, égoïsme, abrutissement télévisuel, bruit, manque de communication, crottes de chien, massacre des animaux, malhonnêteté, cruauté, la liste est quasi infinie...), avait mixé le tout, et casé tant bien que mal cette mélopée de nos tares dans quatre vingt minutes de pellicule. Chaque dénonciation étant habillée, si l'on peut dire, de gags plus ou moins fins, mais toujours répétitifs. L'accumulation d'évidences, même profondément justes, devient amoncellement de clichés lorsqu'elle est jetée n'importe comment, avec outrance et gros sabots. Bâtir un film riche et intelligent avec une idée : critiquer les erreurs de l'humanité, et, surtout, un seul gag : on secoue la tête et, hop ! l'ignorant voit la réalité, relève de la gageure impossible ! 
 
 Certes, il est possible d'extirper de ce fatras quelques moments de poésie (Mila se ressourçant au contact des bébés, la séance d'exercices physiques sur la planète verte, par exemple), ou de drôlerie, mais à côté de cela, que de scènes horripilantes qui vont du simplisme au grotesque pur et stupide (le match de foot final). Coline Serreau retombe ici, surtout au cours de la seconde moitié du film dans le travers déjà présent dans son précédent film : "la crise", à savoir un goût pour les scènes choc, hyper-exagérées, surjouées, qui perdent toute crédibilité à cause de leurs excès, et, souvent, ne sont même pas drôles, tant elles transpirent l'artifice et l'absence de naturel. C'est le cas du pétage de plombs de Patrick Timsit, de l'émission "Téléarc", ou de la discussions politique. 
 
 Pour ce qui est du fond, là aussi, une certaine distanciation est utile. La dénonciation de tous les aspects négatifs du monde actuel est assurément juste et bienvenue, c'est indéniable. En revanche, cette propension à juger idéal un retour à l'état naturel, au stade du "bon sauvage" se nourrissant de baies et passant ses deux cents cinquante années de vie à se baigner dans un lac, est pour le moins singulièrement régressive (même si des cours de télépathie sont ajoutés !). C'est un peu le message véhiculé par le livre de Marlo Morgan : "Message des hommes vrais au monde mutant". Et je ne partage pas cette vision idyllique et réductrice de l'évolution. La vie est perpétuelle évolution, totale expérimentation des possibles qui naissent dans notre esprit, même à travers les erreurs et les défauts majeurs. Et ce n'est pas dans un passé lointain (cf. les deux fils de Mila accueillis dans le désert par une peuplade antique) que nous trouverons la solution des problèmes que nous avons causés, mais dans un futur que nous créons à chaque instant, et qui se situera forcément à une octave supérieure de l'évolution, et non inférieure. 
 
 À la sortie, irritation et déception...
   
Bernard Sellier