Le déclin de l'empire américain, film de Denys Arcand, commentaire

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Le déclin de l'empire américain,
     1986, 
 
de : Denys  Arcand, 
 
  avec : Dominique Michel, Dorothée Berryman, Louise Portal, Remy Girard, Pierre Curzi,
 
Musique : François Dompierre


 
Lire le poème (CinéRime) correspondant : ' Liberté flétrie '

 
Une huitaine d'amis ont prévu de passer le week-end ensemble dans un chalet campagnard. Tandis que les hommes s'emploient à mitonner les plats, les femmes travaillent leurs abdominaux dans un club de gym citadin. Les uns et les autres profitent de l'absence des conjoints pour échanger leurs confidences sentimentales, amoureuses, sexuelles et psycho-philosophiques. Lorsque tous sont réunis, les brillantes apparences voient des fêlures et des lézardes apparaître... 
 
 C'est avec une justesse de ton et un naturel confondants ( qui fait ressembler les soi-disant improvisations Lelouchiennes à des tirades aussi artificielles que savamment préméditées ), que Denys Arcand peint ses personnages aux couleurs de la vie, avec ses joies, ses futilités, ses égoïsmes, ses fantasmes, ses douleurs. Sans complaisance, mais toujours avec une tendresse et une sensibilité émouvantes. Le rire, la jubilation, la tristesse s'entremêlent dans un ballet verbal qui sait ne jamais être pesant tout en livrant une analyse subtile des fêlures que cachent ces personnages qui se prétendent libérés et adultes. Le spectateur a l'impression qu'une fenêtre s'est ouverte et qu'il assiste, invisible, à la discussion de compagnons familiers, qu'il connaît depuis toujours, qui revêtent chacun l'apparence d'une qualité qui vit au fond de son être. C'est une sensation à la fois délicieuse et inconfortable, comme si nous étions confrontés aux zones d'ombre et de fragilité que nous dissimulons du mieux possible aux regards extérieurs et même aux nôtres.  
 
 Tous les acteurs de cette comédie dramatique, Canadiens, sont remarquables de spontanéité, d'exaltation, de sensibilité à fleur de peau, avec une mention particulière au tandem Louise (Dorothée Berryman) - Rémy (Rémy Girard), qui est en quelque sorte le pivot dramatique autour duquel gravitent les autres couples. L'accent délicieux, bien que parfois délicat à dépasser pour la bonne compréhension des dialogues (le Mario de Gabriel Arcand !), contribue encore au charme de ces scènes vivantes et profondément humaines. 
 
 Et c'est le cœur serré et les larmes au bord des yeux que l'on quitte cette réunion dont aucun membre ne sort indemne et qui voit la brisure inexorable d'un couple qui se croyait au-delà de la souffrance et ne connaîtra plus jamais la sérénité.
   
Bernard Sellier