La diagonale du fou, film de Richard Dembo, commentaire

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La diagonale du fou,
     1984, 
 
de : Richard  Dembo, 
 
  avec : Michel Piccoli, Liv Ulmann, Alexandre Arbatt, Leslie Caron, Jean-Hugues Anglade, Michel Aumont,  
 
Musique : Gabriel Yared

  
 
À Genève ont lieu les championnats du monde d'échecs. Deux concurrents s'affrontent : le soviétique Akiva Liebskind (Michel Piccoli), âgé, malade du coeur et le jeune dissident Pavius Fromm (Alexandre Arbatt), ancien élève du Maître. La tension est à son comble car entre les deux hommes est installée une rivalité qui dépasse le simple niveau du jeu. L'équipe qui soutient chaque concurrent va tenter de tout faire pour déstabiliser l'adversaire, quitte à utiliser les coups bas les plus vils... 
 
 Les échecs ne sont évidemment pas le "sport" le plus spectaculaire qui soit, surtout pour un film de cent minutes ! Mais ils ne sont ici que prétexte, décor symbolique, à un affrontement psychologique, politique entre deux personnalités hors du commun. Soit dit en passant, on ne voit d'ailleurs que fort indistinctement les "coups" joués, et les véritables connaisseurs en seront peut-être passablement déçus. Mais Richard Dembo a voulu placer l'affrontement sur le plan humain, ce qu'il a remarquablement réussi. Les deux protagonistes sont criants de vérité, avec une mention spéciale à Michel Piccoli, prodigieux, modèle de sobriété intense. En fait, beaucoup plus que sur l'échiquier lui-même, les "coups" se manifestent dans la préparation des parties où chaque camp va faire avancer les pions dont il dispose pour décontenancer l'adversaire ou carrément le piéger. C'est le cas pour le "retour" savamment programmé de Marina (Liv Ulmann), épouse de Fromm, retenue en URSS dans un hôpital psychiatrique.  
 
 L'ensemble baigne dans une crédibilité savamment installée, ce qui ne va d'ailleurs pas sans inconvénients. Certains acteurs ont un fort accent et un bon nombre de dialogues "pianissimo" ne sont guère perceptibles. Mais cette bataille à la fois historique (nous sommes encore dans le monde de l'avant chute du mur de Berlin) et surtout oedipienne ( Fromm est une sorte de fils du "grand" Akiva, et son angoisse la plus vive est que le "père" meure avant qu'il ait pu montrer sa supériorité sur lui) est de bout en bout captivante, réussissant à installer un crescendo dramatique efficace et intelligent jusqu'à la dernière image. 
 
 Passionnant ! Et parfaitement accessible à tous ceux qui n'ont pas la moindre connaissance des échecs !
   
Bernard Sellier