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La fiancée du pirate,
     1969,  
 
de : Nelly  Kaplan, 
 
  avec : Bernadette Lafont, Georges Géret, Claire Maurier, Julien Guiomar, Jacques Marin, Michel Constantin, Jean Parédès,
 
Musique : George Moustaki

 
   
Marie (Bernadette Lafont) vit misérablement avec sa mère et son bouc dans une cabane. Les notables du village proche les méprisent copieusement. Lorsque la vieille meurt, Marie use de son charme pour que quelques habitants du village l'aident à enterrer sa mère dans les bois... 
 
   Une œuvre mythique avant tout pour avoir fait connaître l'adorable Bernadette Lafont, mais aussi pour l'audace qu'elle manifeste à une époque qui vient de connaître mai 68 mais n'a pas encore vécu la libération des films X. A travers le microcosme d'un petit bourg, ce sont tous les travers de la société qui sont passés à la moulinette d'une satire à la fois féroce et jubilatoire. Croqués avec une dérision gourmande, les quelques notables du pays en prennent chacun pour leur grade et composent des figures caricaturées au vitriol inoubliables. Le garde champêtre frustré (Georges Géret), le pharmacien herboriste "La tisane" (Jean Parédès), le Duc (Julien Guiomar), l'abbé Dard (Pascal Mazzotti), le riche agricultrice Irène (Claire Maurier), tous deviennent obsédés par la sexualité libre de Marie, et voient le pouvoir que leur donne l'argent menacé par la richesse rapide acquise par la prostitution. Jouant habilement des jalousies, du racisme ambiant, de l'attirance qu'elle suscite aussi bien chez les hommes que chez les femmes, la fille de la "Romanichelle" devient l'épouvantail que chacun veut à la fois chasser et baiser, provoquant peu à peu une véritable hystérie dans le village. 
 
   Plaidoyer pour une sexualité libre et assumée, hymne à l'indépendance, au pouvoir de la femme, mais aussi critique acerbe d'une surconsommation inutile qui commence à s'installer même dans les campagnes ( les oeuvres d'art installées devant la cabane de Marie, composées d'ustensiles qui ne servent à rien ), ce film débordant d'énergie ravageuse oscille entre douceur, mélancolie, désespoir et frénésie. Bernadette Lafont, impériale et touchante, avait déjà depuis onze ans une belle carrière derrière elle, mais elle explose ici avec un charme et un charisme étonnants.
   
Bernard Sellier