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Ghost dog, la voie du samouraï,
    (Ghost dog, the way of the Samuraï),      1999,  
 
de : Jim  Jarmusch, 
 
  avec : Forest Whitaker, Henry Silva, Richard Portnow, Cliff Gorman, Tricia Vessey, John Tormey,
 
Musique : RZA

  
   
Louie (John Tormey), homme de main du truand Ray Vargo (Henry Silva), a jadis sauvé la vie d'un jeune noir. Celui-ci, sous le nom de Ghost Dog (Forest Whitaker), est devenu tueur à gages pour son sauveur qu'il considère désormais comme son maître. Mais un jour, après une exécution qui ne s'est pas déroulée comme prévu, Ghost dog devient l'homme à éliminer... 
 
   Après un interminable générique, un non moins interminable périple nocturne en voiture, au cours duquel il faut supporter le regard vide de Forest Whitaker (impassibilité du Samouraï oblige), et un morceau de rap (heureusement calme), l'histoire peut enfin démarrer. Enfin, c'est une manière de parler. Car l'univers dans lequel évoluent les personnages emblématiques du réalisateur n'est pas celui que chacun de nous habite quotidiennement. Il existe donc un abîme entre le monde ordinaire des truands, peuplé de séquences dialoguées que l'on pourrait croire extraites d'un Tarentino mesuré, d'exécuteurs loufoques qui semblent débarqués d'un délire raisonnable des frères Coen, et le monde ascétique, spirituellement codifié, de Ghost Dog. Entre les deux espaces, une seule communication apparente possible, celle de la mort. Ghost Dog est au premier abord un solitaire absolu, un être non communiquant. Mais ce n'est qu'une apparence. Lorsqu'il se trouve confronté à l'univers de l'innocence enfantine, il abaisse les barrières de protection. Lorsqu'il est en présence d'un monde étranger dont il ne comprend pas la langue, (Raymond, le glacier), les échanges se font par télépathie. C'est donc une étrange mixture que nous offre Jim Jarmusch, composée de longues plages contemplatives, d'éclairs de violence, de parlotes, le tout scandé par les pages d'extraits du code des samouraïs, et ses considérations philosophico-mystiques. Suivant son humeur ou son élévation d'esprit, le spectateur pourra considérer tout cela comme un polar famélique, un essai prétentieux, une quête individuelle hermétique, ou un drame éthéré. Ce qui est manifeste, c'est qu'après une ouverture qui donne parfois envie de jeter l'éponge, il devient très difficile par la suite de décrocher, le réalisateur ayant ici fait le choix de rendre sa narration de plus en plus captivante, ce qui n'était pas le cas, par exemple, du rebutant "Dead man". 
 
   Étrange, parfois agaçant à cause de ses partis pris, mais au bout du compte assez fascinant.
   
Bernard Sellier