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Greystoke, la légende de Tarzan,
      (Greystoke, the legend of Tarzan),      1984, 
 
de : Hugh  Hudson, 
 
  avec : Christopher Lambert, Andie McDowell, Ian Holm, James Fox, Nigel Davenport, Ian Charleson, Richard Griffiths, Nicholas Farrell,
 
Musique : John Scott


   
1885, en Ecosse. Lord John 'Jack' Clayton (Paul Geoffrey) décide, malgré l'inquiétude de son père, le riche Comte de Greystoke (Ralph Richardson), de quitter le pays avec sa jeune femme Alice (Cheryl Campbell) pour se rendre en Afrique de l'ouest. Mais le bateau sur lequel ils ont embarqué fait naufrage. Ils sont les seuls rescapés avec le capitaine, qui décide de partir chercher du secours. Cependant les mois passent sans nouvelles. Alice accouche d'un garçon, mais meurt peu après. Le nourrisson est enlevé par un singe femelle qui vient de perdre son petit. Environ deux décennies plus tard, une expédition anglaise arrive dans la contrée. Elle est décimée par les Pygmées et le capitaine Philippe d'Arnot (Ian Holm), un Belge, est sauvé in extremis par un jeune homme sauvage (Christopher Lambert) qui vit parmi les singes... 
 
   Nous sommes bien loin des innombrables aventures héroïco-fantaisistes dont les plus célèbres ont été immortalisées grâce à Johnny Weissmuller, entre 1932 ("Tarzan l'homme-singe") et 1948. Tarzan n'a plus rien ici du surhomme voltigeur. Il est un être hybride, déchiré entre deux mondes. C'est avec une intelligence qui n'étouffe jamais le drame humain et la souffrance primaire que le réalisateur explore cette double vie. Il est servi en cela, d'une manière exceptionnelle, par Christopher Lambert, qui, pour un de ses premiers films marquants, se montrait particulièrement en résonance avec ce personnage aux racines sauvages. Sans verser dans une tendance "retour à la nature" extrémiste, l'histoire stigmatise néanmoins sans équivoque l'orgueil méprisant et criminel de l'homme soi-disant civilisé, tout en lui opposant, de manière équilibrée, un certain nombre de figures chez lesquelles amour et compréhension n'ont pas été pourris par le conformisme ambiant (Philippe, le vieux Comte et Jane, par exemple). A travers la tentative d'humanisation, d'éducation, d'intégration, vouée bien sûr à l'échec, tant la société sclérosée que l'on présente au jeune homme comme "sa famille" se montre infiniment plus mortifère que la jungle, c'est un raccourci aussi magique qu'envoûtant que l'on nous présente. Celui du passage long, douloureux, cahotique, de l'homme-animal à l'homme contemporain. Des centaines de milliers d'années pour quitter l'état dit sauvage et connaître... le capharnaüm actuel, qui donne aux tueries cro-magnonesques l'apparence de jeux innocents. Autant dire pour s'extirper de la bestialité et y replonger !  
 
   Une œuvre inspirée et, de plus, enveloppée d'une musique somptueuse.
   
Bernard Sellier