Katja (Diane Kruger) a jadis épousé en prison Nuri Sekerci (Numan Acar), condamné pour trafic de stupéfiants. Quelques années plus tard, Nuri a crée une petite entreprise et un fils est né, Rocco (Rafael Santana). Mais un jour, le père et le fils sont tués dans un attentat qui, apparemment, visait Nuri...
Diane Kruger a obtenu au Festival de Cannes 2018 le prix d'interprétation et le moins qu'on puisse écrire, c'est que c'est là une juste récompense pour l'incarnation qu'elle nous offre de cette femme dont la vie se brise en même temps que celle de son mari et de son enfant. Le film prend discrètement la forme de chapitres ( ' la justice ', ' la mer '... ) pour suivre les conséquences dévastatrices d'une folie meurtrière aveugle, uniquement justifiée par une admiration sans bornes du nazisme. Traumatisée dans son âme et dans sa chair, contrainte de répondre aux questions policières invasives ( Katja se drogue ponctuellement et son mari était, par son nouveau job en contact avec des truands ), contrainte de subir ensuite la douleur d'un procès dans lequel les mensonges se marient aux doutes, la jeune femme oscille en permanence entre l'apathie, la révolte et le désespoir avec une intensité aussi bouleversante qu'authentique.
Si l'on ne devait donner que deux qualités à cette oeuvre, ce serait : sincérité et dignité. Quelles que soient les circonstances qui se développent à l'écran, jamais le spectateur n'est manipulé ou le moins du monde racolé. Et pourtant, les occasions ne manquent pas, depuis les scènes de procès jusqu'à un dénouement aussi désespéré que tétanisant. Au bout du compte, Fatih Akin ne nous propose pas vraiment une oeuvre politique, ou un film de procès, ou encore une apologie de la vengeance. Il nous offre simplement un film totalement et intensément humain jusque dans l'aveuglement forcené sans retour de Katja. Et l'on en ressort le coeur bouleversé...
Bernard Sellier