Incidents de parcours, film de George A. Romero

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Incidents de parcours,
      (Monkey shines),     1988, 
 
de : George A.  Romero, 
 
  avec : Jason Beghe, John Pankow, Kate McNeil, Joyce van Patten, Stanley Tucci, Christine Forrest,
 
Musique : David Shire

  
   
Allan Mann (Jason Beghe), un brillant intellectuel, est un sportif forcené. Au cours d'un jogging matinal, il est renversé par une voiture. Le diagnostic du docteur John Wiseman (Stanley Tucci) est terrible : malgré l'opération effectuée, la tétraplégie est définitive. Tandis que sa compagne Linda Aikman (Janine Turner) se console dans les bras du chirurgien, Allan revient chez lui où sa mère, Dorothy (Joyce van Patten), a installé un système élaboré de commandes vocales. Geoffrey Fisher (John Pankow), un ami qui effectue des expérimentations sur les singes, a l'idée de former une femelle susceptible de remplacer l'odieuse infirmière, Maryanne Hodges (Christine Forrest), qui a été affectée au service d'Allan. La guenon est confiée à Melanie Parker (Kate McNeil), spécialiste de ce type de dressage. Très rapidement, l'animal est opérationnel...  
 
   Trop souvent victime de délires où le grotesque le dispute à la bêtise, le genre fantastique peut donner naissance à des oeuvres passionnantes, tel ce film assez méconnu de Romero, le réalisateur de "La nuit des morts vivants" (1968). Même si l'exactitude scientifique est mise à mal, et pourrait faire sourire, l'intelligence du concept, du traitement de l'angoisse, de l'évolution des deux "personnages" principaux (Allan et la guenon !), est proprement envoûtante. Sans jamais dériver vers le gore ou l'horrible, l'auteur nous entraîne dans une vertigineuse plongée à l'intérieur de ce qui pourrait être l'état primitif de l'homme : une manifestation à l'état brut de l'instinct bestial, une réalisation fruste, irraisonnée, spontanée du désir, dépouillé de tous les atermoiements et freins que des dizaines de milliers d'années de "civilisation" progressive ont installés sur nos appétits. La progression dramatique de la narration est encore renforcée par l'étrange communication qui s'opère entre les deux cerveaux. Le singe ressent les souhaits, les colères, les désespoirs d'Allan et remplace celui-ci dans une action qu'il est incapable de réaliser, tant physiquement que moralement. Tandis que le jeune homme se sent descendre vers une manifestation douloureuse de ses instincts sauvages originels, la guenon apprend à connaître ces sentiments que l'évolution a générés en nous : la jalousie, l'exclusivité et la haine consciente. 
 
   Très original, subtilement angoissant et "joué", qui plus est, à la perfection par une actrice unique : la guenon au regard oppressant...
   
Bernard Sellier