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The matador,
      2005, 
 
de : Richard  Shepard, 
 
  avec : Pierce Brosnan, Hope Davis, Greg Kinnear, Portia Dawson, Philip Baker Hall, Adam Scott,
 
Musique : Rolfe Kent


   
Julian Noble (Pierce Brosnan) et Danny Wright (Greg Kinnear) arrivent à Mexico par le même avion et descendent au même hôtel. Hormis cela, les deux hommes ont peu de caractéristiques en commun. Le premier vit seul, le second est toujours très amoureux de sa femme, Carolyn 'Bean' Wright (Hope Davis). Le premier est un tueur à gages qui exécute ses contrats sans états d'âme, le second un homme d'affaires stressé qui se trouve face à la dernière chance qui lui est offerte de sauver son poste. Julian et Danny font connaissance au bar de l'hôtel, tard dans la nuit. La première prise de contact est pour le moins heurtée... 
 
   La première surprise est évidemment de voir Pierce Brosnan effectuer un pied de nez aussi radical que réjouissant à son personnage stéréotypé de James Bond. Aussi éloigné du bon goût et de l'élégance manifestés par le séduisant espion de sa (peu) gracieuse Majesté, que Mercure peut l'être de Pluton, il campe ici un être, non seulement condamnable par ses activités, mais encore repoussant, a priori, par son (mauvais) goût pour le mensonge, l'insulte et la muflerie. Grâce à cette volte-face fondamentale, il prouve qu'il est un acteur protéiforme, car son Julian est aussi crédible dans l'abjection que James l'était dans la décontraction élégante.  
 
   Mais là n'est pas, heureusement, le seul intérêt du film. Outre le fait que l'intrigue navigue assez subtilement dans le brouillard (on ne sait pas trop où le spectateur est conduit pendant une bonne moitié de l'histoire), le scénario mélange avec agilité comédie, drame psychologique et polar minimaliste. Dans chacun de ces genres, l'approche est légère, en apparence même superficielle, l'auteur donnant l'impression d'effleurer les différents pôles tout en rebondissant à chaque fois qu'un approfondissement possible se présente. A plusieurs reprises, qui plus est, la composition de Julian frôle l'excès. Pourtant, non seulement la narration évite à chaque fois de sombrer complètement dans l'invraisemblance, mais encore c'est une véritable humanité qui finit par émerger, même et surtout chez Julian, au terme de cette improbable aventure. L'étrange lien qui se crée entre les deux hommes se révèle, au final, aussi touchant que sincère. Le souvenir laissé par le film sera sans doute évanescent, mais sa vision procure, dans l'instant, un plaisir réel, grâce au ton singulier de cette intrigue insolite.
   
Bernard Sellier