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Max et Jérémie,
      1992, 
 
de : Claire  Devers, 
 
  avec : Philippe Noiret, Christopher Lambert, Jean-Pierre Marielle, Christophe Odent, Feodor Chaliapin Jr., Christine Dejoux,
 
Musique : Philippe Sarde

   
   
Jérémie Kolachowsky (Christopher Lambert) est un petit malfrat qui exécute les basses oeuvres d'Eugène Agopian (José Quaglio), avec, au besoin, des éliminations par explosifs. Mais la rémunération est faible. Devant sa demande de contrats mieux payés, le truand propose au jeune homme l'assassinat de Robert Maxendre "Max" (Philippe Noiret, un homme vivant apparemment une tranquille retraite. Jérémie prend contact, mais commence à s'attacher à sa cible. Quelle n'est pas sa surprise en se rendant bientôt compte que Max a été un redoutable tueur à gages. Ce dernier accepte d'ailleurs une dernière mission, effacer pour le compte de Sam Marberg (Feodor Chaliapin Jr.) le vieux Nick Costa (Charles Assas)... 
 
   Nous sommes ici beaucoup plus proches du policier psychologique, façon Simenon, que des conceptions récentes où les rares dialogues sont étouffés par mitraillades ou explosions. Claire Devers prend tout son temps pour raconter cette histoire , dans laquelle le drame humain prend rapidement le pas sur l'intrigue. La rencontre, et surtout l'attachement contre nature, au départ hautement improbable, entre un tueur solitaire, cultivé, distingué, qui prend un soin maniaque à repasser ses chemises, et une jeune voyou, vulgaire, chien fou, à la limite du demeuré, qui se shoote aux séries télé, finit par afficher une vraisemblance, presque une évidence, étonnantes. Ce duo est complété, renforcé, par un troisième pion, le policier aux abords de la retraite, (merveilleusement incarné par un Jean-Pierre Marielle transpirant la mélancolie et la déprime), qui s'échine à coffrer Max depuis plusieurs décennies, et dont l'existence vide n'a plus d'autre support que cet espoir chimérique.  
 
   Les quelques séquences "actives" génèrent le mouvement mécanique qui oriente les différents personnages du trio vers leur épanouissement ou leur extinction. Max se découvre finalement une usure insoupçonnée, exacerbée par la présence de cet énergumène logorrhéique, qui compense sa maladresse et son ignorance par une soif de vivre et de réussir que le vieil homme a perdue. Quant à Jérémie, paumé, vaguement conscient de sa médiocrité, il cherche tout à la fois la reconnaissance d'un aîné et, surtout, la protection d'un père.  
 
   Dire que l'œuvre est palpitante, envoûtante, serait sans doute exagéré, et, en tout cas, hors de propos. Pourtant, grâce à une progression crédible dans la psychologie des protagonistes et dans leurs rapports, grâce à un Christopher Lambert parfaitement à sa place, et à un Philippe Noiret toujours impérial, l'ensemble débouche sur une croisée de destins aussi intelligente que touchante.
   
Bernard Sellier