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Ma mère,
      2000,  
 
de : Christophe  Honoré, 
 
  avec : Isabelle Huppert, Louis Garrel, Emma de Caunes, Olivier Rabourdin, Jean-Baptiste Montagut, Joana Preiss,
 
Musique : --

   
   
Pierre (Louis Garrel) retrouve sa mère, Hélène (Isabelle Huppert), qu'il n'a pas vue depuis des années. Elle habite dans une île espagnole. Tandis que son père (Philippe Duclos) repart en France pour affaires, le jeune homme fait connaissance avec sa génitrice et le mode de vie qu'elle a adopté.Celui-ci est pour le moins libéré. Hélène passe en effet ses journées avec ses amies Rea (Joana Preiss) et Hansi (Emma de Caunes), ainsi que tous les gigolos qui peuplent la contrée. Elle entraîne son fils avec elle... 
 
   On connaît le goût d'Isabelle Huppert pour les incarnations de personnages... originaux ("La Pianiste" en est un bon exemple.). Dans le cas présent, elle ne faillit pas à ses penchants. Je n'ai jamais ouvert un livre de Georges Bataille, dont est inspiré le scénario. Il m'est donc impossible de savoir dans quelle mesure le réaliste-scénariste est resté fidèle au romancier, réputé pour ses écrits érotiques. Quoi qu'il en soit, le résultat n'est guère enthousiasmant ! Que le milieu dans lequel les personnages évoluent soit dépravé, que les individus se couvrent d'un masque pervers afin d'oublier les souffrances qui les rongent, pourquoi pas ! Que nous assistions à la gestion pathologique d'un complexe d'Oedipe carabiné, pourquoi pas ! Le problème réside dans le traitement narratif de cette implosion.  
 
   À l'exception de la jeune Hansi, il est quasiment impossible de se sentir une quelconque affinité avec ces êtres aux comportements artificiels. Qui plus est, le montage haché, l'introduction brutale, sans subtilité, des données psychologiques, les liens improbables entre les séquences, ne favorisent guère une empathie émotionnelle. L'outrance, les provocations, assénées de manière anarchique et voyante, sonnent très rarement juste. Les dialogues, souvent à la limite du maniérisme maladroit, enfoncent parfois les portes du risible (Pierre établissant avec sérieux un parallèle entre Dieu et les fesses !). Des flous, pas artistiques du tout, s'invitent de temps en temps, on ne sait trop pourquoi, et la conjonction images-musique est passablement déroutante (musique religieuse sur une scène de plagistes ; air pop-rock sur le départ de l'ambulance...). Que ce soit voulu ne fait pas de doute (enfin, espérons !), mais cette propension au bric à brac, tant narratif que psychologique, n'est pas faite pour renforcer la crédibilité de l'ensemble. On a l'impression d'assister à une version édulcorée d'un récit de Sade, sur lequel on aurait saupoudré quelques conceptions psychanalytiques.Louis Garrel est en adéquation avec son rôle, c'est-à-dire qu'il affiche en quasi permanence un visage revêche et ingrat. Isabelle Huppert, avec le ton personnel et vaguement décalé qu'on lui connaît, a tout de même bien de la peine à nous faire croire à l'authenticité de cette mère improbable. Mais peut-être est-ce de ma part une méconnaissance de ce que peuvent être certaines génitrices... Sous des apparences d'investigations intérieures approfondies et de dissections émotionnelles osées, beaucoup de vide et d'esbroufe, en fin de compte.
   
Bernard Sellier