Décembre 1944. Les Alliés ont débarqué depuis six mois sur les côtes normandes. Le lieutenant Thomas Hart (Colin Farrell), protégé par son père Sénateur, coule des jours tranquilles loin des batailles. Mais un jour, il tombe dans une embuscade et, après avoir été contraint de livrer quelques renseignements stratégiques, se retrouve prisonnier dans le stalag VI A, dirigé par le colonel Werner Visser (Marcel Iures). Le colonel William McNamara (Bruce Willis) est le plus haut gradé allié présent. Quelques temps après, arrivent deux pilotes de chasse noirs, Lincoln Scott (Terrence Dashon Howard) et Lamar Archer. Ils sont fort mal accueillis, surtout par le sergent Bedford (Cole Hauser). Ce dernier est retrouvé mort et Scott se voit accusé du meurtre...
Ce film laisse une impression bizarre et mitigée. Il débute en force, avec l'épisode de la capture du lieutenant Hart et un tableau impressionnant de corps gelés dans la neige. Puis c'est la plongée dans l'horreur des interrogatoires, du transfert dramatique au stalag. Ensuite, c'est l'intégration dans le camp, sous la double domination du colonel allemand, autoritaire, en concordance avec l'image noire que l'on a du nazi, et du colonel américain, non moins autoritaire, campé par un Bruce Willis (version sérieux), fidèle à lui-même, mâchoires serrées et rictus menaçant. Etant donné le titre français, on se dit que c'est parti pour une préparation spectaculaire d'évasion. Eh bien, pas du tout ! Arrivent les deux prisonniers noirs et c'est dans la direction de l'étude (superficielle) du racisme dans l'armée américaine qu'oblique l'histoire. Sujet d'autant plus intéressant qu'il n'est pas fréquemment traité. Puis nouvelle orientation : le meurtre a lieu et c'est une étonnante cour martiale qui se crée sous nos yeux au milieu du camp, avec plaidoiries, coups de théâtre classiques et responsables nazis au premier rang des spectateurs ! Mais, alors qu'on avait un peu oublié le message du titre, celui-ci prend tout son sens puisque évasion il y a...
Bref, c'est un peu tout et n'importe quoi. Mais reconnaissons-le, assez bien emballé, apportant de ci de là des zones d'ombres dans les événements et les personnages (surtout en ce qui concerne le colonel allemand), servi par un Colin Farrell excellent, passant imperceptiblement du lâche friqué à l'homme responsable. Par contre, le message humanitaire et antiraciste est englué dans une grandiloquence verbale appuyée, démonstrative, et le final triangulaire (honneur, devoir, sacrifice) en fait tout de même beaucoup dans le pathos ! Les adeptes de l'état militaire se dresseront au garde à vous ! Cependant, malgré tous ces ingrédients hautement émotionnels (ou plutôt à cause de leur empilement excessif), les souvenirs qui demeurent après la vision du film se résument à un petit nombre d'images chocs et à quelques moments intenses éparpillés dans cet ensemble hétéroclite.
Bernard Sellier