Mon amie Adèle, Saison 1, série de S. Lightfoot, commentaire

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Mon amie Adèle,
      (Behind her eyes),     Saison 1,     2021, 
 
de : Steve  Lightfoot, 
 
  avec : Simona Brown, Eve Hewson, Tom Bateman, Robert Aramayo, Georgie Glen, Aaron Antoine,
 
Musique : Rupert Gregson-Williams


 
Ne pas lire avant d'avoir vu la série

 Louise (Simona Brown), divorcée d'avec Ian (Aaron Antoine), vit seule avec son fils Adam (Tyler Howitt) à Londres. Dans un bar, elle fait un soir la connaissance de David Ferguson (Tom Bateman), un psychiatre, et s'aperçoit le lendemain qu'il est son nouveau patron. Quelques jours plus tard, elle rencontre son épouse, la charmante et mystérieuse Adèle (Eve Hewson)... 
 
 L'histoire commence de manière très paisible et traditionnelle. Une rencontre fortuite, une attirance larvée, une cohabitation professionnelle que l'on devine plus ou moins chahutée par les hormones, rien de très marquant au premier abord. Pourtant, à la fin du premier quart d'heure, une alerte discrète se manifeste. Les apparences lisses affichent une première entaille légère. Et celle-ci ne cesse de se dupliquer tout au long des six épisodes, tout en prenant bien soin de caracoler autour du mystère avec une capacité d'ensorcellement aussi déroutante que distante et magnétique. Dans ce genre de thriller psychologique, la réussite de l'entreprise repose sur deux points essentiels. L'intrigue, bien sûr, mais aussi l'attachement, l'intérêt, voire l'empathie que le spectateur peut ressentir pour les personnages.

 Ici, il est indéniable que ces deux cases sont cochées avec talent. Bien malin celle ou celui qui entreverra la véritable finalité de l'histoire. Jusqu'à la dernière seconde, le scénario se livre à un jeu de ping pong magistral entre les pathologies supposées et les emprises apparentes qui se manifestent au sein des couples. Tour à tour, au fil de scènes fluctuantes, énigmatiques, chaque protagoniste semble tour à tour dominer son partenaire et mener au score. Mais c'est sans compter sur une suite de rebondissements roublards, de flashback et de cauchemars aux noirceurs savamment distillées, qui redessinent à chaque minute le puzzle que l'on croyait avoir recomposé. Quant au trio, devenu rapidement quatuor, qui fusionne et se déchire en permanence, il se montre d'une intensité charismatique proprement fascinante. Elles ne sont pas légion les oeuvres qui offrent au spectateur une association de personnalités qui allient de manière aussi unanime une expressivité intense, une ambiguïté subtile, et une fragilité (feinte ou réelle) bouleversante (exceptionnelles prestations de Simona Brown et de Eve Hewson!). Quant à David Ferguson, il souffle le brûlant et le glacé avec un art souverain. Certains esprits dits «cartésiens» pourront tiquer devant les explications finales, fondées sur les «voyages astraux», même si, depuis plusieurs décennies, ce type d'expérience de sortie de la conscience hors du corps a été très vulgarisée par nombre de stages plus ou moins sérieux. Il est vrai aussi que le dénouement de ce drame se pare d'une pirouette psychologique qui peut sembler passablement artificielle et destinée avant tout à donner le coup de grâce à celui qui, à ce moment-là, est certain d'avoir remis en place tous les éléments du puzzle. On peut aussi chipoter sur une accumulation de cauchemars récurrents un tantinet envahissants. Il n'en demeure pas moins que cette série, qui joue à plaisir avec la dissimulation, les mensonges, les manipulations, les angoisses, la duplicité, la folie, la fusion amoureuse, emprisonne le spectateur dans une toile d'araignée aussi tortueuse qu'envoûtante.   
   
Bernard Sellier