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Phénomène,
      ( Phenomenon ),     1996, 
 
de : Jon  Turteltaub, 
 
  avec : John Travolta, Forest Whitaker, Kyra Sedgwick,
Robert Duvall, Jeffrey De Munn,
 
 
Musique : Thomas Newman, Eric Clapton

   
   
George Malley (John Travolta) est un modeste employé de garage dans un bourg de la campagne américaine. Il est amoureux de la belle et solitaire Lace Pennamin (Kyra Sedgwick) qui vit seule avec ses deux enfants. Mais elle ne lui laisse aucun espoir. Une nuit, après avoir fêté son 37 ème anniversaire avec ses amis, en particulier Nate Pope (Forest Whitaker) et le médecin du village, Brunder, (Robert Duvall), George aperçoit une vive lumière et perd connaissance. A son réveil, il est un autre homme. Lui qui a toujours été un cancre, il dévore plusieurs livres par jour, apprend tout ce qu'il veut, devient sensible aux vibrations telluriques et se découvre des pouvoirs de télékinésie ! Ce "cadeau" providentiel ne va pas tarder à lui causer bien des désagréments... 
 
   Lors de la sortie du film, certains critiques n'ont pas manqué de vitupérer contre cette histoire qui pourrait être une apologie de la transformation miraculeuse que propose, par le biais de pratiques douteuses, l'école de Scientologie dont John Travolta fait partie. Je ne sais absolument pas quelle est la réalité, à supposer qu'on puisse la connaître, concernant ce groupement. Certains sont prompts à juger, à condamner, oubliant que, d'une part, tout ce qui existe est participateur de notre évloution, même si l'apparence ponctuelle est "négative", et, d'autre part, confondant rumeurs et faits. Pour avoir fait personnellement partie de plusieurs Ordres mystiques tout à fait "sains", je sais, par expérience, que s'y engouffrent toutes sortes de personnages qui vont de l'être hautement évolué spirituellement (en apparence, bien sûr...) à la personnalité plus... allumée, si l'on peut dire. Il n'en reste pas moins que, bien évidemment, les fautes avérées de certains groupuscules ou "sectes" doivent être sanctionnés sans hésitation.  
 
   Plutôt que de faire un procès d'intention à cette aventure, examinons-la un tant soit peu objectivement. Le scénariste a intelligemment choisi un individu ordinaire, un "bon sauvage" à la mode Rousseau, pour être le dépositaire de ce don bien encombrant. Avec simplicité, rusticité, une certaine superficialité aussi, il faut le reconnaître, il croque, à travers des incidents plus ou moins ténus, les conséquences funestes de cette invasion soudaine de capacités dans un être fruste qui ne sait comment les utiliser, n'ayant pas la connaissance spirituelle ou ésotérique nécessaire. Toute cette histoire, tout au moins jusqu'à l'explication finale, elle aussi judicieusement choisie, évitant l'écueil du surnaturel ou du grotesque, pourrait être une illustration de cet adage : "on ne peut pas faire le bonheur de quelqu'un malgré lui". Nombre de personnes multiplient les pratiques plus ou moins dangereuses pour accéder à cette illusion des "pouvoirs" qu'ils confondent avec la véritable évolution spirituelle, et seraient prêts à tout donner pour les posséder. George les reçoit sans avoir rien demandé et connaît la souffrance que génère leur acquisition : incompréhension et peur des autres, jugements, rumeurs, calomnies. Dans cette vision bien peu idyllique, se profile même la célébration de la simplicité et de l'humilité dans son sens propre : être conscient de sa place de vie et l'apprécier pleinement. 
 
   Cette fable quelque peu "philosophique" me rappelle une histoire hindoue que j'aime beaucoup et dont je transcris l'idée, ne me rappelant plus les détails exacts : 
 
   "Un jour Bouddha, en se promenant, rencontre un grand et célèbre Sage, très âgé. Celui-ci se prosterne et demande : "Maître, pouvez-vous me dire combien il me reste de vies à effectuer sur cette terre ?" Bouddha lui montre un arbre avec toutes ses feuilles et lui répond : "Autant que de feuilles sur cet arbre !". Le Sage est effondré. "Tant que ça, avec tout ce que j'ai fait, toutes les prières que j'ai effectuées... C'est horrible...". Bouddha poursuit son chemin et rencontre un paysan usé par le travail. "Maître, demande le paysan, combien de vies me reste-t-il à effectuer sur cette terre ?" Bouddha lui montre un arbre comportant dix fois plus de feuilles que le précédent et lui dit : "Autant de feuilles que sur cet arbre, mon brave !". Le paysan s'incline et répond : "Très bien, je vais me remettre au travail tout de suite". A cet instant, une bourrasque survient et arrache toutes les feuilles de l'arbre... sauf une... "
 
   A méditer...
   
Bernard Sellier