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Un plan simple,
      (A simple plan),       1995, 
 
de : Sam  Raimi, 
 
  avec : Bill Paxton, Billy Bob Thornton, Bridget Fonda, Brent Briscoe, Chelcie Ross, Gary Cole,
 
Musique : Danny Elfman

  
   
Hank Mitchell (Bill Paxton) mène une petite vie tranquille dans une bourgade isolée. Il n'est pas riche, mais travaille avec sérieux. Sa femme, Sarah (Bridget Fonda), est enceinte. Un jour d'hiver, en compagnie de son frère Jacob (Billy Bob Thornton) et de leur copain Lou Chambers (Brent Briscoe), ils découvrent dans la forêt un petit avion de tourisme accidenté. A l'intérieur, un sac contenant plus de quatre millions de dollars ! Après quelques hésitations, Hank accepte de garder le secret ainsi que la fortune, pendant quelques mois, puis de la partager en trois parts. Ils apprennent bientôt que les billets proviennent d'un kidnapping... 
 
   Le film aurait pu s'appeler "Le Bon, la Brute, l'Innocent". Mais, tout comme dans le film de Sergio Leone, les qualificatifs sont à prendre avec circonspection. Dans les premiers instants, le spectateur a l'impression qu'il va être précipité dans le monde débridé, extravagant, des Frères Coen ("Fargo"). En réalité, le ton se révèle très vite fort différent. A partir d'une base hyper-simple, Sam Raimi compose une chronique réaliste et désespérée. Développe le constat, certes évident et antédiluvien, que les liens tant familiaux qu'amicaux ne peuvent longtemps résister lorsque l'argent présente son visage. Pire, que si des tempéraments faibles, tels Jacob et Lou, se laissent profondément perturber par l'irruption d'une possible fortune, ce qui est normal, des individualités en apparence saines et fortes, telles Hank et Sarah, se voient plus encore précipités dans la monstruosité. Sans effets spectaculaires, avec une spontanéité naturelle, l'engrenage infernal se met tranquillement en place. Et, tandis que les événements se dramatisent, les personnages dévoilent parallèlement leur véritable nature, leurs aspirations inavouées, leurs frustrations anciennes. Certains secrets de famille voient le jour. Si Lou incarne avec peu de variations "la brute" épaisse, avinée, les personnalités des deux frères révèlent progressivement leurs limites, mais aussi leurs richesses insoupçonnées. C'est en particulier le cas pour Jacob, magistralement habité par Billy Bob Thornton, qui, sans quitter son état mental limité, met à jour une sensibilité et un altruisme particulièrement touchants. La narration est lente, les silences pesants, en osmose avec la nature glaciale, insensible. Il est difficile d'imaginer que le créateur de "Evil Dead" ait su opérer une reconversion aussi notoire pour donner naissance à une œuvre d'une sensibilité aussi maîtrisée qui, jamais, ne sacrifie à l'efficacité dramatique.
   
Bernard Sellier