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Les révoltés du Bounty,
     (Mutiny on the Bounty),      1962, 
 
de : Lewis  Milestone, 
 
  avec : Marlon Brando, Trevor Howard, Richard Harris, Hugh Griffith, Tarita,
 
Musique : Bronislau Kaper

   
   
23 Décembre 1787, Portsmouth. William Brown (Richard Haydn), expert jardinier embarque sur le "Bounty" qui doit se rendre à Tahiti pour ramener des "arbres à pain" et, peut-être, changer la face de la nourriture européenne. Le navire est commandé par le capitaine William Bligh (Trevor Howard). Le second, malade, est remplacé au dernier moment par le lieutenant Christian Fletcher (Marlon Brando). La navigation commence et, rapidement, le capitaine se montre autoritaire et obsédé par le temps perdu... 
 
   D'emblée les données sont claires. D'un côté un capitaine dur, intransigeant, dont la souveraineté ne doit pas être contestée. De l'autre un étrange officier, qui tient plus du jeune beau gominé que du loup de mer, incarné par un étonnant Marlon Brando à la voix sifflante de fausset, arrivant à bord vêtu d'un incroyable costume efféminé et arborant pour dormir un bonnet de nuit hilarant ! Son personnage présente d'ailleurs une ambivalence marquée et se montre plus qu'ambigu. On devine à travers ses mimiques, ses réparties, une désapprobation vis à vis de la froide férocité du capitaine. Mais cela ne ressemble-t-il pas davantage à une jouissance dans l'insolence qu'à une véritable condamnation morale ? Ce mélange de dandy et d'officier responsable dans le personnage central de Fletcher Christian, est d'ailleurs ce qui marque le plus dans les deux premiers tiers de cette adaptation.  
 
   Pour ce qui est de la réalisation, un seul mot la qualifie : nonchalance. Le terme pourrait tout aussi bien s'adapter à Marlon Brando dans l'incarnation qu'il nous propose. Si l'on excepte les moments de déchaînement de Bligh envers les insubordonnés, et, bien sûr, le court passage de l'affrontement des deux officiers, l'ensemble se traîne quelque peu dans les eaux bleues du Pacifique. L'intermède tahitien, exotique et charmant, dure tout de même quarante minutes qui paraissent bien longues ! Le troisième tiers du film, à partir de la mutinerie, devient plus intéressant dans la mesure où le personnage de Brando s'affirme et se complexifie. Bligh, de son côté, demeure l'apôtre inflexible et méprisant de la justice expéditive. 
 
   La reconstitution du navire, effectuée spécialement pour le film à partir de données authentiques, est réussie, de même que le tournage en décors réels, mais le vérisme général est aussi éloigné de celui du récent "Master and commander" que la Terre l'est de Pluton ! La tempête du début secoue parfois le navire comme un fétu, mais à l'intérieur quasiment rien ne bouge... Quand au final, passablement théâtral, il achève de tirer l'oeuvre vers un romantisme quelque peu déplacé. 
 
   Malgré le face à face de deux acteurs remarquables, l'ensemble demeure très conventionnel et manque de concentration dramatique.
   
Bernard Sellier