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Le roi Arthur,
       (King Arthur),      2004, 
 
de : Antoine  Fuqua, 
 
  avec : Clive Owen, Keira Knightley, Mads Mikkelsen, Joel Edgerton, Stellan Skarsgård, Hugh Dancy,
 
Musique : Hans Zimmer, Nick Glennie Smith...


   
Il y a bien longtemps, alors que l'Empire Romain s'étendait encore sur une grande partie de l'Europe, de valeureux guerriers Sarmates avaient été enrôlés de force dans l'armée impériale, avec promesse de liberté au bout d'un certain nombre d'années de service. Parmi eux, une troupe quasiment mythique, composée de Lancelot (Ioan Gruffudd), Gauvain (Joel Edgerton), Bors (Ray Winstone), Tristan (Mads Mikkelsen), Galahad (Hugh Dancy), avec, à leur tête, Arthur (Clive Owen). Après une mission qu'ils croient la dernière avant leur démobilisation, ils reçoivent, de la part de l'évêque Germanius (Ivano Marescotti), l'ordre de franchir le mur d'Hadrien et de sauver la famille d'un important Romain, Marius Honorius (Ken Stott), menacé par l'avance de Cédric le Saxon (Stellan Skarsgård)... 
 
   Lorsque l'on passe de la vision véritablement chevaleresque de cette épopée légendaire, filmée par Richard Thorpe en 1953 ("Les Chevaliers de la Table Ronde"), à celle-ci, le choc est rude ! Nous sommes à mille lieues du couple Ava Gardner-Robert Taylor, bien propre sur lui, gratifié d'une noblesse limpide, distinguée et, pour tout dire, certainement peu en accord avec la réalité. Oubliée, également, la spiritualité simpliste qui faisait de ces guerriers des êtres proches de Grands Initiés. C'était très beau, fort inspirant, mais, aujourd'hui, cela sonne tout de même plus que démodé.  
 
   Ici, nous plongeons directement dans la vision moderne d'un Moyen-Age apocalyptique, dans lequel la vie humaine n'a pas plus de valeur que celle d'un poulet. Entre brouillard permanent, boue, combats sanglants, masques terreux, violences permanentes, il ne reste plus guère de place pour la grandeur de l'aspiration chevaleresque, tel qu'on la conçoit dans notre imaginaire éthéré. C'est tout au moins la sensation que le spectateur éprouve pendant une bonne partie de l'histoire. Les "Chevaliers" ne se distinguent guère du tout venant guerrier. Puis, insensiblement, une vague émergence de l'idéal que la Tradition prête à ces hommes, se dessine. Dans leur gangue grossière de personnages ordinaires, assez anonymes, immergés dans les tueries incessantes, pointe une notion de liberté intérieure en même temps qu'un idéal indépendant de la simple quête d'émancipation qui les dirigeait jusque là. L'injustice ordinaire qu'ils côtoient et, surtout, la sagesse innée de leur chef, leur font entrevoir la fausseté des principes prônés par les soi-disant représentants du Catholicisme. Sans atteindre l'intensité exceptionnelle d'un Russell Crowe dans "Gladiator", Clive Owen se montre très convaincant dans le rôle d'Arthur. Pour ce qui est de Guenièvre, nous avons affaire à une tigresse guerrière aux dents ensanglantées, qui n'est pas sans surprendre. Elle entre dans la conception actuelle qui privilégie le spectaculaire au détriment du subtil. Quant à Merlin (Stephen Dillane), il a totalement troqué sa robe de mage pour un habit de combattant ordinaire... Décidément, les mythes ne sont plus ce qu'ils étaient ! Snif, snif... 
 
   L'ensemble ne révolutionne assurément pas le genre. C'est du solide, du brutal, doté de reconstitutions convaincantes, parsemé de moments assez impressionnants (qui le sont, paraît-il, encore davantage dans la version longue), tels le combat sur le lac gelé ou la bataille finale, et porteur, occasionnellement, d'une certaine force épique. Mais les personnages qui entourent Arthur sont franchement basiques, et le défaut, tant d'ambition que d'âme, se fait cruellement sentir. Reste une épopée primaire conduite avec habileté et intensité, bien soutenue par la musique de Hans Zimmer.
   
Bernard Sellier