Ma vie avec Liberace, film de Steven Soderbergh

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Ma vie avec Liberace,
      (Behind the Candelabra),      2013, 
 
de : Steven  Soderbergh, 
 
  avec : Michael Douglas, Matt Damon, Scott Bakula, Debbie Reynolds, Dan Aykroyd,
 
Musique : Marvin Hamlisch

 
   
Le jeune Scott Thorson (Matt Damon), passionné par les animaux, rêve de devenir vétérinaire. Un jour, son amant lui fait connaître un pianiste de variétés légendaire, Walter Liberace (Michael Douglas), qui se produit sur de nombreuses scènes. L'artiste est subjugué par le charme puissant de Scott. Il ne tarde pas à renvoyer son compagnon actuel, Billy (Cheyenne Jackson), et installe sa nouvelle relation dans sa luxueuse demeure. 
 
   Le spectateur est d'emblée frappé, voire fasciné, par la personnalité hors normes de Liberace. Excessif dans tous les domaines de la vie et de l'art, assumant totalement, pour chacune de ses prestations, une théâtralité tapageuse, voyante, opulente, provocatrice, il se montre en représentation permanente, comme si l'art devait obligatoirement s'accompagner de strass, de surabondante magnificence, pour donner la pleine mesure de ses aspirations, pour rendre avec fidélité la profusion des dons qu'il accorde au public et à ceux qui l'entourent. Ce thème est d'ailleurs au coeur des souffrances relationnelles qui peu à peu perceront la carapace du clinquant. LIberace a la sensation de donner sans relâche, de n'être entouré que de sangsues avides de profiter de la richesse matérielle ou artistique abondamment versée en lui par le Divin. Dans ce contre emploi spectaculaire, somptueux, troublant, parfois émouvant, toujours revêtu de tenues coûteusement excentriques, Michael Douglas se montre constamment étonnant. Ce qui est aussi le cas, dans un registre évidemment plus effacé, du sculptural Matt Damon. Mais, au-delà de cet apparat visuel, des paillettes, des discordes amoureuses obligées qui émaillent la (courte) vie du couple, que reste-t-il ? Une banale aventure amoureuse entre un tyran talentueux, charmeur, et un jeune homme sans grande envergure, qui subit, plus qu'il ne vit, une soumission dans un écrin doré. Certes, l'homme mûr qui l'a pris sous son aile mi amoureuse, mi paternelle, ne lui est pas indifférent. Il n'empêche que l'usure ne tardera pas à se faire sentir. L'oeuvre se clôt sur une scène touchante ("la quête") dans laquelle le pianiste s'élève à la fois physiquement et émotionnellement. Mais ce qui perdure est avant tout, heureusement ou malheureusement selon les sensibilités de chacun, c'est le pompeux de la reconstitution, la préciosité maniérée d'un Liberace presque caricatural (tout au moins dans la VF), et le relatif prosaïsme de cette relation, même si quelques échanges intimes fendillent la carapace de l'artiste orgueilleux et mégalomane.
   
Bernard Sellier