The wife, film de Björn Runge, commentaire

  Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

The wife,
      2017, 
 
de : Björn  Runge, 
 
  avec : Glenn Close, Jonathan Pryce, Max Irons, Christian Slater, Harry Lloyd, Elizabeth McGovern, Annie Starke,
 
Musique : Jocelyn Pook

 
   
1992. Joseph Castleman (Jonathan Price), célèbre écrivain, apprend qu'il est le lauréat du Prix Nobel de littérature. En compagnie de son épouse Joan (Glenn Close), il se rend à Stockholm pour la remise du prix. Leur fils David (Max Irons) est du voyage... 
 
   La simplicité de la trame narrative est inversement proportionnelle à la richesse psychologique de l'oeuvre. Tout commence dans le rose bonbon. La récompense suprême vient couronner une vie consacrée à l'écriture. Joseph et Joan donnent l'apparence d'un couple magnifiquement uni. La joie est manifeste, d'autant plus que leur fille Susannah (Alix Wilton Regan) attend un enfant. Mais, très vite, les failles commencent à apparaître, le vernis du bonheur montre quelques lézardes. David (Max Irons), le fils, apprenti écrivain lui aussi, est mal dans sa peau. Sans être un fin limier, on comprend très vite, dès avant le milieu du film, la clé du problème. Mais ce n'est pas un handicap, car la qualité de l'oeuvre repose avant tout sur la subtile observation de deux personnalités dont l'association, la réussite sociale, reposent sur une duperie. Il y a mystification du public, des sommités littéraires, mais il y a surtout une tromperie interne au couple, construite sur les non dits, sur une suite de compromis, d'envies, de frustrations. Et celle-ci est de loin la plus tragique, puisqu'elle mine en profondeur l'union de deux êtres qui s'aiment malgré tout profondément. 
 
   Nul manichéisme dans cette dissection d'un éclatement programmé. Joseph se révèle au bout du compte assez sympathique, simplement victime d'un égo qu'il a inconsciemment laissé enfler au fil des ans et des réussites littéraires. Mais c'est bien sûr le personnage de Joan, incarné de manière majuscule par une Glenn Close toute en finesse, qui occupe le devant de la scène. A travers d'infimes expressions, des regards plus expressifs que des milliers de mots, elle est véritablement cette épouse qui, plus ou moins volontairement, a totalement mis sa vie de côté, pour laisser s'épanouir la gloire de son époux. Chacun a sa part de responsabilité dans cet état des lieux et le film parvient à rendre aussi perceptible qu'émouvant ce mélange complexe d'amour, de jalousie, de rancoeur, d'inconscience, qui pourrit aussi bien la vie du couple que celle des enfants.
   
Bernard Sellier