Anna M., film de Michel Spinosa, commentaire

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Anna M.,
        2007,  
 
de : Michel  Spinosa, 
 
  avec : Isabelle Carré, Gilbert Melki, Anne Consigny, Francis Renaud, François Loriquet, Gaëlle Bona,

Musique : ???


 
Ne pas lire avant d’avoir vu le film.

 
Anna (Isabelle Carré) est restauratrice de documents anciens à la Bibliothèque Nationale de France. Elle vit en compagnie de sa mère et s'enfonce peu à peu dans la dépression. Une tentative de suicide avortée la conduit à l'hôpital. Elle est soignée par le docteur André Zanevsky (Gilbert Melki) et se découvre soudain une folle passion pour son thérapeute. Elle le poursuit de ses assiduités avec une agressivité de plus en plus inquiétante... 
 
 Michel Spinosa reprend la recette qui avait fait le succès de « Liaison fatale », mais l’adapte fort intelligemment à sa vision des rapports humains tout en se gardant bien de verser dans la surenchère spectaculaire. Une longue partie de l’histoire semble emprunter les chemins balisés de la folie meurtrière inéluctablement croissante. A force de se heurter au mur qu’elle a elle-même dressé, Anna, ange fragile et perturbé, développe progressivement une dangerosité qui semble n’avoir d’autre issue possible que le bain d’hémoglobine. Isabelle Carré porte entièrement le film, explorant tous les registres de son personnage avec une maîtrise exceptionnelle. Que ce soit dans l’innocence désemparée, dans la colère extériorisée, dans le délire de la persécution, dans la candeur troublante, dans la rouerie manipulatrice, elle se montre d’une justesse confondante. Heureusement d’ailleurs, car le scénario, intégralement focalisé sur elle, avec des personnages secondaires (volontairement ?) falots, l’installe, bien que la compassion du réalisateur soit toujours évidente, dans la position d’une bête curieuse coupée de la réalité, évoluant dans l’univers marginal qu’elle s’est forgé, et, de ce fait, passablement étrangère. Le réalisateur ne cherche aucune explication psychanalytique au comportement déviant d’Anna, se contentant d’aligner, de manière plus que convaincante les extravagances de plus en plus mortifères de son héroïne. 
 
 Mais, alors que le spectateur s’attend au pire, le scénario négocie un virage habilement ambigu vers ce qui semble être, sinon une illumination, tout au moins une gestion apaisée de la folie possessive. Là encore, le réalisateur-scénariste laisse la porte ouverte à diverses interprétations. Au final, une œuvre troublante, subtilement construite, plus riche que la première longue partie ne le laissait supposer, et passionnante de bout en bout.
   
Bernard Sellier