Elle, film de Paul Verhoeven, commentaire

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Elle,
        2016, 
 
de : Paul  Verhoeven, 
 
  avec : Isabelle Huppert, Laurent Lafitte, Anne Consigny, Charles Berling, Virginie Efira, Judith Magre, Christian Berkel,
 
Musique : Anne Dudley

  
   
Michèle Leblanc (Isabelle Huppert) dirige une boite de production de jeux vidéo en compagnie de son amie Anna (Anne Consigny). Un jour, elle est agressée et violée chez elle par un inconnu masqué. Mais, curieusement, elle ne prévient pas la police... 
 
   Depuis le vénéneux "Basic instinct" et le raté "Showgirls", il est évident que Paul Verhoeven est attiré par les personnalités féminines troubles et psychologiquement dérangées. Le personnage de Michèle ne fait pas exception à la règle et nul ne sera surpris de le voir incarné par Isabelle Huppert, elle aussi séduite par les rôles ambigus. On se souvient de "La pianiste" de Michael Haneke. Prenant immédiatement à contrepied les réactions vengeresses style "I spit on your grave", le romancier Philippe Djian et le réalisateur vont entraîner le spectateur dans un monde intérieur trouble, dérangeant, peuplé de culpabilisations cachées, de masochisme assumé, de pulsions sexuelles névrotiques, parfois assaisonnés d'une ironie grinçante. Dans ce jeu pervers, duquel les femmes sortent détachées et victorieuses (la dernière image du film), les hommes se montrent soit faibles (le fils Vincent (Jonas Bloquet) complètement soumis à la corrosive Josie (Alice Isaaz), Richard (Charles Berling), ex-époux transparent, Robert (Christian Berkel), pitoyable amant), soit adeptes de la violence brute (l'agresseur), histoire de masquer les traumatismes intérieurs. Cette suite de faux-semblants, traversée ponctuellement de saillies sauvages, est conduite de main de maître dans une atmosphère constamment sombre, au propre comme au figuré. Il n'est même pas évident que le soleil apparaisse une seule fois dans les 2h10 du film ! Pourtant, si la narration et l'interprétation se montrent souveraines, demeure tout de même sur cet ensemble déstabilisant une chape glaçante (même sans pic à glace !), qui contribue à valoriser la cérébralité, le conceptuel, au détriment de l'émotionnel.
   
Bernard Sellier