Entre ciel et terre, film de Oliver Stone, commentaire

  Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

Entre ciel et terre,
      (Heaven & earth),     1993, 
 
de : Oliver  Stone, 
 
  avec : Haing S. Ngor, Joan Chen, Thuan K. Nguyen, Dustin Nguyen, Debbie Reynolds, Tommy Lee Jones,
 
Musique : Kitarô

 
   
Le Ly (Hiep Thi Le) est une jeune Vietnamienne qui vit paisiblement dans ce qui est, pour elle, le plus beau village du monde. Mais, en 1953, les Français arrivent et inaugurent une longue période de guerre et de misères. Dix ans plus tard, ce sont les Américains qui débarquent. Tiraillés entre les Vietcongs et les forces du sud, les villageois n'en finissent plus d'être déchirés physiquement et moralement. Le Ly est arrêtée et torturée. Libérée grâce à l'argent de sa dot, elle doit fuir son village qui la considère désormais comme une traîtresse. Elle habite un temps Saïgon et devient servante d'un riche marchand. Mais pour avoir cédé aux avances du maître, elle est chassée et donne naissance à un petit garçon, Jimmy. Quelques années plus tard, elle fait la connaissance d'un sergent, Steve Butler (Tommy Lee Jones) qui devient rapidement amoureux d'elle et lui propose de l'épouser... 
 
    Troisième volet de la trilogie extrême-orientale d'Oliver Stone, après "Platoon" (1986) et "Né un 4 juillet" (1989). Fondé sur les ouvrages de Le Ly, cette oeuvre est une fresque historique couvrant plusieurs décennies de guerre, en même temps qu'un drame personnel et une quête de l'identité. Illuminé par la beauté de Le Ly, parsemé de scènes dramatiques, incrusté de paysages d'une beauté magique qui contraste avec la violence des hommes, le film a cependant, je trouve, une certaine difficulté à émouvoir dans la durée. Il a souvent été dit que la seconde partie, qui voit la difficile intégration américaine de la jeune femme, mais celle, plus grande peut-être encore de ce sergent qui est incapable de s'extirper des images d'enfer qu'il rapporte avec lui, était plus faible que la première. C'est assez juste, dans la mesure où le personnage de Tommy Lee Jones, par ailleurs fort émouvant, est parachuté au bout d'un temps long. Il est donc assez difficile d'entrer dans la profondeur de cet homme torturé par la culpabilité, d'autant que son changement intérieur est précipité d'une manière assez abrupte. Le réalisateur n'a pas retrouvé ici la puissance qu'il avait insufflée au survivant Ron Kovic.  
 
Mais ce n'est là, je pense, qu'un aspect secondaire, qui n'explique pas vraiment la certaine distance que j'ai ressentie vis à vis de cette expérience dramatique de vie. La cause en serait davantage, peut-être, un certain didactisme issu de la narration en voix off, qui commente les événements à la lumière des enseignements bouddhistes. Voulue, fort probablement, par l'auteur, cette explication répétitive des liens avec les ancêtres, des dettes karmiques et de la roue des réincarnations couvre les horreurs et la folie des hommes d'un manteau qui éteint quelque peu l'émotion. La compensation est, en revanche, l'intégration d'une sorte de voile de sagesse qui parle, non plus à la nature émotionnelle du spectateur, mais, plus subtilement, à son âme.  
 
Une oeuvre étrange, dérangeante et, par instants, mais par instants seulement, magique.
   
Bernard Sellier