Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

Equilibrium,
     2002, 
 
de : Kurt  Wimmer, 
 
  avec : Christian Bale, Sean Bean, Dominic Purcell, John Keogh, William Fichtner, Angus MacFadyen, Emily Watson,
 
Musique : Klaus Badelt


   
2070. Une troisième guerre mondiale a eu lieu. Pour enrayer définitivement tout germe de conflit, "Le Père" a eu l'idée de créer un produit miracle, le Prozium, qui annihile toute émotion chez l'être humain. Chacun doit donc à heures régulières s'injecter sa dose, sous peine de devenir un transgresseur, et de finir soit sous les balles des ecclésiastes, soit dans un incinérateur. John Preston est un ecclésiaste de premier ordre, efficace au point d'avoir exécuté sa femme qui avait cessé son traitement... 
 
   Parmi les innombrables films Z que propose Netflix, figurent quelques précieuses pépites, telle cette oeuvre d'anticipation à laquelle Christian Bale prête son charisme magistral. Certes, tout n'est pas admirable dans cette fresque apocalyptique d'un avenir terrifiant. Au premier chef, une propension à la violence, assurément très graphique, mais qui lorgne de façon malsaine vers la déshumanisation des jeux vidéo. Ensuite, une décalcomanie franchement primaire des envols guerriers de "Matrix". Mais à côté de ces facilités complaisantes, que de richesses, tant dans le scénario que dans les réflexions suscitées par l'histoire. L'immense majorité des êtres humains souhaitent (ou croient souhaiter) la fin des conflits, la disparition des guerres et de la haine. Mais pour qui analyse profondément cette aspiration, son utopie apparaît immédiatement. Si la haine disparaissait, l'amour ferait de même. S'il n'y avait soudain plus d'ombre, c'est que la lumière aurait déserté la vie. Cela paraît une évidence puisque nous vivons dans un monde de dualité. Mais il est plus qu'utile de visualiser ce que pourrait devenir un monde sans émotions. Tout au moins un monde duquel les émotions seraient balayées artificiellement, comme c'est le cas ici. Cette situation est bien sûr fondamentalement différente de la maîtrise des émotions que prôna le Bouddha. Celle-ci naissait d'une évolution intérieure, individuelle, qui place la conscience pure en gestionnaire de notre vie. À cette aberration sociale, s'ajoutent nombre de réflexions sur l'obéissance aveugle, sur l'uniformisation des êtres, sur la destruction barbare des oeuvres d'art (un sujet d'actualité, hélas !), ainsi que sur l'horreur de la délation, et certaines scènes sont à ce point de vue terrifiantes dans leur glaciale inhumanité (le fils de John). 
 
   Une œuvre riche, captivante, souvent surprenante par son refus de la facilité événementielle, qui sacrifie hélas à quelques complaisances regrettables.
   
Bernard Sellier