1944 à New York. La riche Florence Foster Jenkins (Meryl Streep) souffre depuis près d'un demi-siècle de la syphilis. Passionnée depuis toujours par la musique, fondatrice d'un club Verdi, et amie du célèbre chef d'orchestre Arturo Toscanini, elle décide un jour de donner un récital. À la suite d'auditions organisées par son mari, St Clair Bayfield (Hugh Grant), un jeune pianiste, Cosmé McMoon (Simon Helberg), est sélectionné. Lors des répétitions, celui-ci se rend compte, avec consternation, que la voix de Florence est une catastrophe. Mais il ne peut se défiler et se produit en tant qu'accompagnateur...
L'histoire est rigoureusement semblable à celle contée un an plus tôt dans le film «Marguerite» de Xavier Giannoli, qui avait décalé les faits à la fin de la première guerre mondiale et confié le rôle de la malheureuse cantatrice à la touchante Catherine Frot. Nous retrouvons donc des données à peu près similaires, avec un époux prêt à toutes les compromissions et manoeuvres pour que sa «belette» réalise ses voeux les plus profonds, même s'il vit en concubinage avec la jolie Kathleen (Rebecca Ferguson). Le récit se concentre sur le couple, auquel s'ajoute très rapidement le pianiste dont la personnalité évolutive ne manque pas d'intérêt. Sous ses dehors de comédie qui vire parfois à la farce, le récit est en fait une magnifique histoire d'amour à multiples facettes. L'amour passion de Florence pour la musique. L'amour protecteur de St Clair qui s'est donné pour mission de protéger sa femme envers et contre tout (tous). Enfin la compassion de Cosmé pour cette femme exaltée jusqu'à l'aveuglement total, compassion qui, peu à peu, supplante le désir légitime de se construire une carrière brillante de pianiste, puisqu'accompagner Florence dans ses exhibitions calamiteuses est assurément un suicide programmé. Les encarts placés à la fin du film confirment d'ailleurs que cette prestation à Carnegie Hall fut le point d'orgue de la carrière de Cosmé Mc Moon, qui se reconvertit dans le culturisme après la mort de la cantatrice. Il est amusant de constater que son interprète, Simon Helberg, évoque, par son physique et sa physionomie épanouie, le jeune Vladimir Ashkenazy, lors de ses débuts en 1955-1960. Les incarnations de Meryl Streep et de Hugh Grant sont empreintes de sensibilité et de finesse, mais elles n'éclipsent en rien la performance de Catherine Frot, d'autant plus que le film de Stephen Frears, très balisé, ne sort jamais de l'aura familiale dans laquelle se développe la pathologie de Florence. Nulle allusion ici à l'émancipation de la femme, qui constituait une thématique importante dans le film de Xavier Giannoli.
L'oeuvre est touchante, gorgée de délicatesse, mais le résultat n'a rien d'exceptionnel.