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Frères du désert,
     (The four feathers),     2002, 
 
de : Shekhar  Kapur, 
 
  avec : Wes Bentley, Mohamed Bouich, Kate Hudson, Heath Ledger, Campbell Brown, Daniel Caltagirone, James Cosmo, Lucy Gordon, Djimon Hounsou,
 
Musique : James Horner

   
   
Harry (Heath Ledger), fils du Général Faversham, est lieutenant dans un régiment anglais. Il est fiancé avec la belle Ethné (Kate Hudson), fille également d'un brillant militaire décédé. Une sombre nouvelle arrive un jour. Des Musulmans soudanais, sous les ordres du Mahdi, ont massacré la garnison d'un fort britannique. Le régiment de Harry doit partir d'urgence. Mais le jeune homme donne brutalement sa démission de l'armée. Totalement incompris par ses camarades, exception faite de son ami Jack Durrance (Wes Bentley), il reçoit les quatre plumes blanches, symboles de la lâcheté. Ayant perdu l'amour d'Ethné, il s'embarque pour le Soudan et tente de rejoindre clandestinement le lieu où est cantonné son ex-régiment... 
 
   Cette fresque, remake du film homonyme de Zoltan Korda (1939), ainsi que de celui de Merian C.Cooper, dix ans plus tôt !, est l'adaptation du roman "les 4 plumes blanches" de A.E.W.Mason (1902). N'ayant jamais lu le roman, ni vu aucune des adaptations, j'ignore si la traduction cinématographique de Shekhar Kapur est fidèle ou non à l'esprit originel. Ce qui paraît évident, c'est qu'elle ne mérite tout de même pas, à mon sens, la volée de bois vert que la plupart des critiques lui ont assénée. Il est sûr que les données historiques sont totalement absentes. L'intérêt n'est jamais porté sur les motivations du Mahdi, pas plus que sur les raisons de l'intervention des Britanniques. De toute manière, se considérant comme les êtres civilisés de la planète (avant que les Américains ne prennent le relais...), il ne pouvaient être absents d'une quelconque contrée du globe ! Histoire d'inculquer leur profond humanisme chrétien aux pauvres barbares, à coups de canon et de baïonnettes... 
 
   Il est également impossible de nier que le réalisateur ne lésine pas sur les effets grandiloquents. Le refus de la guerre que manifeste Harry, se révèle, en fait, un tremplin pour décupler les ressources infinies de l'être, placé volontairement dans des conditions exceptionnellement dramatiques. Malgré ce consensus sur la valeur de l'homme révélée par la guerre, ou peut-être grâce à lui, cette fresque ne manque pas d'un panache certain, recèle des moments forts (la bataille dans le désert, ou encore la prison dans laquelle se fait enfermer Harry), exacerbe les envolées de noblesse d'âme et de courage indomptable, avec une vraisemblance il est vrai parfois mise à mal. L'accent est mis sur le personnage étrange de Abou Fatma (Djimon Hounsou), qui n'est pas sans évoquer Azeem le Grand de "Robin des bois, prince des voleurs", et dont on ne comprend pas toujours les motivations profondes. Mais les contradictions ou étrangetés qui pourraient hérisser l'épiderme du spectateur délicat sont balayées par l'affirmation la plus imparable qui soit : "telle est la volonté de Dieu" ! Que répondre à cela ?  
 
   Le trio formé par Heath Ledger, Wes Bentley, Kate Hudson, sans être inoubliable, est tout à fait convaincant. Les deux hommes, en particulier, ne manquent pas d'intensité dramatique. S'il est possible et légitime de regretter que l'orientation générale de l'oeuvre ne manifeste jamais de réaction critique vis à vis du consensus de l'époque sur le bien-fondé de la main-mise coloniale britannique, il est tout aussi justifié d'en apprécier les qualités esthétiques et tragiques. Cela dit, une nouvelle version s'imposait-elle ? C'est un autre débat...
   
Bernard Sellier