Grave, film de Julia Ducournau, commentaire

  Bienvenue sur le site d'un manipulateur de mots, passionné d'écriture, de cinéma, de musique, d'ésotérisme...     

Grave,
       2016, 
 
de : Julia  Ducournau, 
 
  avec : Garance Marillier, Ella Rumpf, Laurent Lucas, Joanna Preiss, Bouli Lanners, Marion Vernoux, Rabah Nait Oufella,
 
Musique : Jim Williams

   
   
Ne pas lire avant d'avoir vu le film...

   Justine (Garance Marillier) intègre l'école vétérinaire en première année. Sa soeur aînée, Alexia (Ella Rumpf) y étudie déjà. Une épreuve de bizutage la contraint à manger un rein de lapin cru. Végétarienne, sa réaction allergique est violente. Mais ce n'est pas la seule qui apparaît... 
 
   Un premier film, qui plus est tourné par une jeune femme... Il y a déjà de quoi être plus qu'interpellé lorsqu'on a fini de visionner cette oeuvre torturante, sanglante et profondément dérangeante. Très très loin des comédies potaches qu'on a l'habitude de nous présenter, le film entraîne le spectateur dans un monde glauque, horrifique, traumatisant, où se mêlent la quête d'identité, l'expérience sexuelle, les plaisirs ou les souffrances de la chair, et, in fine, l'un des ultimes interdits qui subsistent encore dans notre civilisation. L'incontestable réussite de l'histoire est de mêler très intimement le quotidien d'une bande d'étudiants a priori 'normaux' avec le monde fantastique des vampires ou autres zombies cannibales. Le réalisme et l'authentique se mêlent intimement avec le monstrueux. 
 
   Le choix de la jeune Garance Marillier est à lui seul une éclatante réussite. Fragile, timide, chétive, vulnérable, elle incarne avec une puissance phénoménale et une rage contrôlée cette bête interne qui sommeille, attendant l'heure de la libération pour frapper et satisfaire ses instincts primaires. La construction dramatique du récit est implacable. Hélas ! Cent fois hélas ! Le dernier plan du film fait retomber, de manière incompréhensible, la tension extrême, la progression tragique des ombres de l'inconscient, dans le fourre-tout traditionnel des lignées de tarés ordinaires, façon «La colline a des yeux». 
 
   Cerise sur le gâteau, une fois le film apprécié et, surtout, digéré, il pourrait être intéressant d'analyser les motivations qui ont poussé la réalisatrice dans ce genre de voie. Apparemment, une sacrée manne pour les psychanalystes...
   
Bernard Sellier