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Intacto,
      2001,  
 
de : Juan Carlos  Fresnadillo, 
 
  avec : Leonardo Sbaraglia, Eusebio Poncela, Max von Sydow, Antonio Dechent, Guillermo Toledo, Albert Ponte, Mónica López,
 
Musique :   Lucio Godoy

   
   
Federico (Eusebio Poncela) est un homme hyper-chanceux. Recueilli par le mystérieux Samuel (Max von Sydow), qui dirige un casino, il est à son service pour des missions particulières. Lorsqu'un joueur exagérément favorisé par le sort est remarqué à une table, Federico s'approche de lui, le touche comme par accident. Le résultat est immédiat : la chance tourne immédiatement ! Mais aujourd'hui, Federico veut quitter son mentor. Celui-ci le prend fort mal et, après lui avoir retiré son don, le fait rouer de coups par ses sbires. Sept ans plus tard, Federico, agent d'assurances, est à la recherche d'un homme aussi chanceux qu'il le fut jadis. Or, à la suite d'un crash aérien, un rescapé, Tomás (Leonardo Sbaraglia), est découvert. Indemne mais poursuivi par la police. Federico le contacte et lui propose la liberté s'il entre à son service... 
 
   Voilà assurément une oeuvre profondément originale, dont on ressort surpris, manipulé, heurté, voire bouleversé. Le point de départ, la protection qu'apporte la chance à certains êtres élus, évoque vaguement "Etat second" de Peter Weir. Mais le virage pris très rapidement par le scénario nous engage sur une voie totalement différente. Nous plongeons ici dans l'univers d'un jeu étonnant, dans lequel les personnages, hiératiques et quasiment inhumains, se combattent à coups de probabilités, de cartes distribuées par le destin. Mais il ne s'agit pas seulement de loteries classiques, comme pourrait le laisser penser l'ouverture de cette histoire, à la banalité trompeuse. Au fur et à mesure que le récit développe ses méandres, le spectateur se voit plongé dans une bataille de destinées, dans laquelle les vies elles-même sont mises en jeu, celles des participants, mais aussi celles de leurs proches !  
 
   Alors que tant de récits se contentent d'aligner des épisodes convenus ou répétitifs, nous sommes, dans le cas présent, ballottés en permanence dans l'inconnu, nous demandant à chaque nouvelle séquence vers quelle création diabolique le réalisateur va entraîner notre attente angoissée. Y a-t-il beaucoup de films dont les personnages, sortes de vampires suceurs de chance, et presque aussi étrangers à notre monde quotidien que les Aliens du Nostromo, soient aussi intensément marqués par l'empreinte qu'ils véhiculent ? Les décors eux-mêmes, parfois glacés, déserts (le casino isolé dans son décor de montagnes nocturnes, et son sous-sol, véritable dédale de salles bétonnées et vides sont impressionnants), inondés de rouge, sont, eux aussi, marqués du sceau de l'originalité. Quant à la construction dramatique, vicieuse, labyrinthique, parfois déroutante, surtout dans les trente premières minutes où le spectateur est quelquefois perdu, elle ne mérite que des éloges, conduisant à un final aussi rusé que brillant. 
 
   Envoûtant et profondément jubilatoire ! A noter, qui plus est, une musique en parfaite adéquation avec l'atmosphère ambiante.
   
Bernard Sellier