K-19, le piège des profondeurs, film de Kathryn Bigelow

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K-19, le piège des profondeurs,
     (K-19 : The Widowmaker),      2002, 
 
de : Kathryn  Bigelow, 
 
  avec : Harrison Ford, Liam Neeson, Sam Redford, Sam Spruell, Peter Stebbings,
 
Musique : Klaus Badelt

  
   
1961. La guerre froide fait rage. Mikhail Polenin (Liam Neeson) est commandant du futur sous marin nucléaire K-19, qui doit prochainement prendre la mer pour effectuer des essais. Au dernier moment, il est remplacé par Alexei Vostrikov (Harrison Ford) et devient second, ce qui provoque le mécontentement de l'équipage. Après divers contretemps et dix morts accidentelles, le sous-marin prend enfin la mer. Vostrikov se montre dur et peu soucieux de la vie des hommes. Brusquement, un défaut dans le compartiment de propulsion provoque une panne de refroidissement et une fuite radioactive. Il ne reste que quelques heures pour tenter de réparer avant une éventuelle explosion... 
 
   Kathryn Bigelow se fait assez rare au cinéma, mais, lorsqu'elle y fait une apparition, le résultat est tout à fait intéressant. Certes les films de sous-marins ne sont plus aujourd'hui l'exception et se montrent souvent passionnants. Outre "Le bateau" de Wolfgang Petersen, chef-d'oeuvre du genre, nous avons eu droit depuis quelques années aux excellents : "A la poursuite d'Octobre rouge", "U 571" et "USS Alabama" qui, tous dans leur genre, apportaient un lot de drame et de tensions spectaculaires. Celui-ci ne fait pas exception à la règle. Malgré une absence de scènes monumentales, qui lui a peut-être causé un certain tort sur le plan du succès, la tragédie vécue en vase clos par ces marins tient le spectateur en suffocation quasi permanente et tire intelligemment l'histoire vers l'intime plutôt que vers le sensationnel. 
 
   A priori, l'oeuvre repose sur un face à face entre deux personnalités apparemment opposées, tout aussi charismatiques l'une que l'autre. Liam Neeson est l'humanité personnifiée, le commandant adoré de ses hommes. Harrison Ford, vieilli, semble incarner la dureté impersonnelle et aveugle, le robot inflexible du parti communiste. Tous deux sont excellents. Mais, au-delà de ce qui semble annoncer un affrontement manichéen, la réalisatrice nous entraîne vers un enrichissement permanent des deux tempéraments et négocie très habilement un retournement de situation aussi surprenant que riche psychologiquement. Quant à la trame dramatique, elle ne fait à aucun moment défaut et il paraît bien difficile d'oublier les visages brûlés au troisième degré des malheureux matelots ayant pénétré dans la salle radioactive sans combinaison de protection, parce que le magasin avait oublié d'en commander avant l'embarquement ! Moments intenses qui sont parfois accompagnés maladroitement par une musique quelque peu incongrue. Et si l'on a droit aux quelques inévitables couplets finaux sur l'héroïsme et le sacrifice, il faut reconnaître qu'ils sont loin d'être déplacés ! 
 
   Une réalisation forte et passionnante, fondée, qui plus est, sur des faits réels révélés au public vingt-huit ans après leur déroulement.
   
Bernard Sellier