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Ludwig van B.,
      (Immortal beloved),       1994, 
 
de : Bernard  Rose, 
 
  avec : Gary Oldman, Jeroen Krabbé, Isabella Rossellini, Johanna Ter Steege, Valeria Golino, Miriam Margolyes,
 
Musique : Beethoven, Rossini

  
   
Ludwig van Beethoven (Gary Oldman) est mort. Son unique frère survivant espère être l'héritier, mais Schindler (Jeroen Krabbé), l'ami (enfin, si l'on peut dire, puisqu'il se fait traiter de violoniste raté et de crétin...) du compositeur, découvre une ultime lettre du Maestro "A la bien aimée lointaine". C'est à cette inconnue, non nommée, que Beethoven souhaite léguer ses biens et sa musique. Mais qui est-elle ? Schindler part à sa recherche auprès des femmes qui ont compté dans la vie du musicien... 
 
   Lorsque apparaît le mot "fin" sur l'écran, une question légitime se pose. Quel a été le but du réalisateur en nous offrant ces deux heures consacrées à l'un des plus grands génies de la musique ? Un hommage ? C'est ce qui paraissait intellectuellement logique en commençant la vision. Au vu du résultat, ça tient infiniment plus du lynchage en règle que de l'hagiographie ! Que les génies de la peinture, sculpture, musique, littérature, ne soient pas des saints, c'est une évidence. Et le malheureux Beethoven, victime de la pire punition qui puisse atteindre un artiste compositeur, à savoir la surdité, peut légitimement avoir souffert au plus haut point de cette infirmité ! De là à voir fulminer du début à la fin une espèce de fou furieux, grossier, vulgaire, égoïste, violent, méprisant, à la limite de l'autisme...il y a un grand pas, me semble-t-il ! Dès lors, cette quête, d'ailleurs assez maladroitement menée, à mon sens, par un Schindler monolithique et surtout désacralisée par un commentaire en voix off assez basique, paraît bien abstraite et vaine. Heureusement que l'on se pose souvent la question : quelle sera la femme qui a pu devenir amoureuse de ce pantin pitoyable ? Lorsque la vérité nous est livrée, après maints pétages de plombs et délires pathologiques, on se dit que le grand Beethoven avait effectivement un intense besoin d'une psychothérapie efficace ! 
 
   Mais le plus triste dans ce film n'est pas dans cette accumulation caricaturale de méchanceté et d'enfermement sur soi-même. Pour moi, le pire est l'absence quasi totale de grandeur, d'envergure, de poésie et, surtout, le fait dramatique qu'à aucun moment, ne transparaît la noblesse d'inspiration qui a fait de cet homme un titan musical. Ce personnage de pitre, à la limite du repoussant, investi par un Gary Oldman en osmose totale avec la vision privilégiée par le réalisateur, pourrait tout aussi bien n'être qu'un petit professeur de piano provincial à l'esprit dérangé ! S'impose, tout au long de l'œuvre, l'horrible impression que Bernard Rose, ou son scénariste, n'ont volontairement retenu de sa vie que les mesquineries, les méchancetés, les bassesses, en occultant l'aspect créateur et visionnaire du génie. C'est tout de même un comble ! Même dans les délires baroques et les visions psychédéliques d'un goût parfois douteux que nous livrait Ken Russell dans ses "Mahler" ou "Music Lovers", il était possible de percevoir la folie inspiratrice de Mahler ou de Tchaïkovsky. Ne parlons évidemment pas du génial "Amadeus"... Ici, c'est le néant absolu.  
 
   Que retirer de cette oeuvre déroutante ? Quelques rarissimes instants qui marquent le souvenir : avec la comtesse Anna Marie Erdödy (Isabella Rossellini) et la scène où, pendant "l'écoute", si l'on peut dire, de sa neuvième symphonie, on voit le jeune Beethoven, étendu, s'élever et se fondre dans les étoiles. Ainsi que la composition de Gary Oldman. C'est bien peu.
   
Bernard Sellier