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Samsara,
      2001, 
 
de : Pan  Nalin, 
 
  avec : Shawn Ku, Christy Chung, Neelesha Bavora, Lhakpa Tsering,
 
Musique : Cyril Morin


   
Le Ladakh. Un petit groupe de Lamas se rend dans la demeure où médite, en catalepsie, depuis 3 ans, 3 mois, 3 semaines & 3 jours, un jeune moine, Tashi (Shawn Ku). Ramené lentement et précautionneusement à la vie, il reprend son existence traditionnelle dans le monastère voisin. Mais, contrairement à ce que lui avait promis son maître, Apo (Sherab Sangey), il se rend compte que les désirs charnels n'ont pas disparu et que la souffrance de la frustration ne le laisse pas en paix. Il décide de partir dans le monde et d'expérimenter les émotions qui l'attirent. Il se rend dans un village où, quelques semaines plus tôt, une jeune femme, Pema (Christy Chung), avait semblé attirée par lui... 
 
   "Samsara" désigne la roue des réincarnations, la succession interminable des naissances et des morts. Le but du Bouddhisme est de parvenir à mettre fin à cette inéluctable redescente dans la matière.  
 
   Pan Nalin, qui a réussi l'exploit, grâce à son humilité, de tourner dans les magnifiques décors du Ladakh, à 5000 mètres d'altitude, nous livre une méditation lente, profondément empreinte d'humanité et de spiritualité, sur le déchirement intérieur d'un être placé à un carrefour crucial de son existence : devant lui deux voies se présentent : celle de la dévotion pure, qui implique, comme ce fut le cas pour le Bouddha, la séparation d'avec le monde objectif ; ou bien la descente dans ce monde et l'immersion dans l'univers des tentations avec le risque de s'y perdre. ( "Est-il préférable de satisfaire un millier de désirs, ou d'en dominer un seul ?"). 
 
   A-t-on souvent eu l'occasion de se voir invité, avec autant de pudeur, de respect, d'authenticité, d'émotions à la fois bridées et poignantes, de dignité dans l'érotisme, de violence contenue, dans le tréfonds de l'âme humaine, au sein des angoisses métaphysiques qui font redouter tour à tour la frustration oppressante de l'isolement monastique et l'appel complaisant de la chair qui menace la personnalité de noyade? Tout cela placé dans un écrin magique, écrasant de beauté pure ? Les deux personnages principaux, remarquablement choisis, portent sur leur visage cette noblesse, cette élévation intérieure qui illumine l'ensemble de l'oeuvre. 
 
   Il y a infiniment plus de grandeur spirituelle dans la scène finale, déchirante, où Pema évoque avec gravité la souffrance endurée par Yasodhara, épouse abandonnée par le Bouddha, que dans les deux heures ignoblement boursouflées de " La Passion du Christ " ! 
 
   Magnifique et inspirant... Le genre de film rare que l'on quitte dans un état de grâce intemporel, purifié et grandi.
   
Bernard Sellier