Seules les bêtes, film de Dominik Moll, commentaire

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Seules les bêtes,
      2019,  
 
de : Dominik  Moll, 
 
  avec : Denis Ménochet, Laure Calamy, Damien Bonnard, Valeria Bruni Tedeschi, Bastien Bouillon,

Musique : Benedikt Schiefer


   
Michel Farange (Denis Ménochet) est propriétaire d'une ferme dans le Causse Méjan en Lozère. Sa femme, Alice (Laure Calamy), assistante sociale, s'occupe d'un solitaire, Joseph (Damien Bonnard), qui a perdu sa mère récemment. Un jour, une jeune femme, Evelyne Ducat (Valéria Bruni Tedeschi), qui possède une résidence secondaire, disparaît. Cédric Vigier (Bastien Bouillon) interroge Michel et Joseph, mais n'obtient pas de lumières sur l'affaire... 
 
   Il y a presque deux décennies, Dominik Moll nous avait donné un "Harry, un ami qui vous veut du bien" particulièrement captivant. Durant cette période, il ne s'est pratiquement pas manifesté, ne tournant que deux longs métrages passés assez inaperçus et quelques courts métrages. C'est étrange, parce qu'il donne vraiment l'impression d'avoir des choses à dire et à montrer. L'histoire commence dans le froid glacial et la solitude de la Lozère profonde. Un trio de personnalités qui, manifestement, souffrent de leurs conditions de vie plus que rudes. Si Alice paraît relativement équilibrée, ce n'est qu'une façade. Son mari, Michel, est un gros ours mal léché. Quant à son 'protégé' Joseph, amant occasionnel, il ne brille pas par la qualité de ses neurones. La première impression est que nous allons droit vers un polar minimaliste comme savent en réaliser les Danois ou Norvégiens. 
 
   Mais la donne change assez rapidement. La division en chapîtres commence à interpeller. C'est vers une création éclatée, façon Alejandro González Iñárritu, que se dirige le réalisateur. Les scènes se chevauchent à la manière d'un puzzle dont les pièces seraient progressivement placées au bon endroit par les différents protagonistes. Certes, malgré la construction implacable de ce tableau éclaté en multiples éclats, le charme n'opère pas aussi intensément que dans "Amours chiennes" ou "21 grammes". La responsabilité en incombe sans doute au fait que Dominik Moll a choisi de présenter ses aplats avec une clarté, un prosaïsme bruts. La construction est élaborée, mais les matériaux utilisés sont objectivés avec rudesse. Semblables en cela aux conditions météorologiques ! En revanche, cette quête aveugle et désespérée de l'amour, cette vertigineuse valse des coïncidences, des synchronicités, bien que très écrites, se révèlent assez vertigineuses et, au bout du compte, émouvantes, voire fascinantes.
   
Bernard Sellier