Sex/Life, Saison 1, série de Stacy Rukeyser, commentaire

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Sex/Life,
      Saison 1,        2021, 
 
de : Stacy  Rukeyser..., 
 
  avec : Sara Shahi, Mike Vogel, Adam Demos, Margaret Odette, Jonathan Sadowski, Li Jun Li,
 
Musique : Mark Isham


   
Ne pas lire avant d'avoir vu la série

   
Billie (Sara Shahi) a expérimenté durant sa vie de jeune célibataire 73% des positions du Kama Sutra avec un nombre incalculable de partenaires. Mais elle a rencontré Cooper Connelly (Mike Vogel), séduisant financier vert, l'a épousé et est devenue mère de deux enfants, Hudson (Phoenix Reich) et Hilary. Son mari ne fait plus guère attention à elle, et ses fougeux ébats avec l'un de ses anciens amants, Brad Simon (Adam Demos) lui manquent terriblement. Il réapparaît bientôt dans sa vie... 
 
   La série pourrait s'appeler «Une femme sous influence» - mais la mise en parallèle serait un peu blessante pour le très beau film éponyme de John Cassavetes -, voire «Cinquante nuances de Billie», ou de Brad, ça n'a guère d'importance. Sans le fouet ou les menottes. Dès les premières confidences en voix off et les rebondissements initiaux, le spectateur sait à quoi s'en tenir. Nous ne sommes pas devant un modèle d'analyse psychologique affûtée, au coeur de plongées vertigineuses dans les méandres subtils de l'inconscient freudien ou jungien, mais dans la grosse cavalerie des créations télévisuelles qui se donnent des airs psychanalytiques dont elles ne possèdent pas le moindre rudiment. Cooper est entièrement concentré sur sa profession, sur ses réussites, voire sur le match de football américain retransmis à la télévision, qui lui semble beaucoup plus envoûtant que le fessier, pourtant excitant, de son épouse. Mais il tombe sur le journal intime de Billie, et, par la grâce d'un miracle soudain, se métamorphose en un Brad bis, capable de toutes les excentricités. Nul ne doutera une seconde du réalisme de cette volte-face ! Nous ne sommes pas devant une thérapie brève, mais carrément devant un phénomène paranormal. Pour être franc, au terme du troisième épisode, après avoir subi une grosse vingtaine de parties de jambes en l'air (heureusement qu'ils n'en ont que deux chacun...), un énorme ras le bol commence à s'annoncer. Il serait grand temps qu'un rebondissement (un vrai) se présente et oriente l'histoire vers une voie un peu plus captivante et inventive. Il reste tout de même cinq épisodes à subir. Et jusqu'alors, la recette est immuable : petit souvenir, crac crac ; engueulade, crac crac ; retrouvailles, crac, crac ; sortie nocturne, crac crac ; petit échange pseudo psychologique, crac crac, ascenseur, crac crac ; voiture, crac crac, piscine, crac crac... Épuisant ! Heureusement que les scénaristes se sont mis à 7 pour accoucher de cette merveille de créativité ! L'exemple de «Sex education» prouve, s'il en était besoin, qu'il est tout à fait possible de centrer une série sur le sexe, tout en étant amusant, divertissant, inventif, profond, intelligent, varié, original. Dans le cas présent, c'est le degré zéro de toutes ces qualités qui s'affiche. 

    À mi-parcours, il semble pourtant que le récit commence à s'extirper enfin du trio qui, jusqu'alors, squattait tous les plans. L'amie noire de Billie, Sasha Snow (Margaret Odette) s'intègre peu à peu, ainsi que l'orientale Francesca (Li Jun Li), et il est possible d'espérer que ce sang neuf apporte une diversification de l'intrigue, bien morne jusqu'à présent, malgré les galipettes interminables des protagonistes. Soyons clair, aucun miracle ne se produit. Disons simplement qu'un soupçon d'intérêt se développe dans l'analyse psychologique de la charmante Billie, totalement écartelée entre le beau garçon bien propre sur lui et dans sa vie qui lui a fait deux enfants, et le vilain bad boy envoûtant, enfant traumatisé, qui joue avec ses proies comme le tigre avec la gazelle. Cela dit, il est assez cocasse d'avoir inséré Billie dans la peau d'un docteur en psychologie, étant donné qu'on ne voit vraiment pas quelle pourrait être son utilité thérapeutique pour des patients perturbés, alors qu'elle-même est incapable de s'extirper un tant soit peu des sables mouvants qui l'aspirent inexorablement. Grâce au personnage assez touchant de Cooper et à l'implication dramatique de la très séduisante Billie, cette seconde moitié sauve tout de même en partie cette série entièrement axée sur le dilemme cornélien : sécurité ou frissons, et fièrement revendicative de la quête du plaisir féminin.
   
Bernard Sellier