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Shakespeare in love,
      1998, 
 
de : John  Madden, 
 
  avec : Joseph Fiennes, Gwyneth Paltrow, Geoffrey Rush, Tom Wilkinson, Judi Dench, Colin Firth, Ben Affleck, Rupert Everett,
 
Musique : Stephen Warbeck

  
   
1595, à Londres. Deux théâtres se partagent les faveurs du public et de la Reine Elizabeth (Judi Dench). L'un, dirigé par Richard Burbage (Martin Clunes), rencontre le succès. Ce n'est pas le cas de l'autre, dirigé par Philip Henslowe (Geoffrey Rush). Celui-ci menacé par son créancier, Hugh Fennyman (Tom Wilkinson), tente de faire pression sur le jeune William Shakespeare (Joseph Fiennes), afin qu'une pièce sorte en fin de la plume du poète. Mais Will, chassé par sa femme, passe son temps dans les bouges et voit son inspiration dramatiquement tarie. Un jour, il rencontre, à un spectacle, une jeune, belle et riche héritière, Viola de Lesseps (Gwyneth Paltrow). Malheureusement, elle est promise, ou plutôt vendue par ses parents, à un aristocrate presque ruiné, Lord Wessex (Colin Firth)... 
 
   Couronné par plusieurs Oscars, le film ne manque pas de charme. Le thème n'est pas sans évoquer "Amadeus". Un créateur au génie méconnu que la postérité se chargera d'installer sur le piédestal qu'il mérite. Un adversaire reconnu par ses pairs et adulé du public (dans le cas présent, Christopher Marlowe (Rupert Everett)), contre lequel il faut sans cesse lutter. Un artiste à la personnalité pour le moins excentrique et volage. Un accouchement des oeuvres plus que laborieux. Une reconstitution d'époque pleine de bruit, de couleurs, de charme, à défaut d'être vraisemblable (les costumes semblent tous sortir de la teinturerie). Et surtout des acteurs gorgés de sève juvénile, de frénésie rêveuse, qui, secondés par une féerie de couleurs, donnent à l'histoire une aura romanesque ensoleillée, virevoltante, que l'on aurait plutôt vue s'épanouir dans les environs de Venise et non dans les brouillards londoniens. Même la majestueuse Reine Elizabeth, à côté de laquelle un couvercle de tombeau semble facétieux, révèle un tempérament déconcertant.  
 
   Cela dit, si le plaisir que prend le spectateur est indéniable, si la construction scénaristique, mettant en parallèle les joies et douleurs vécues par William, avec l'évolution créative de sa pièce, "Romeo et Juliette", est aussi intelligente que passionnante, il n'en demeure pas moins que l'énergie un peu brouillonne qui chamarre la première moitié de l'oeuvre, laisse sur la durée une impression de superficialité. Ce n'était pas le cas pour "Amadeus". Heureusement, le romantisme désespéré de la seconde partie apporte une compensation bienvenue à la frivolité initiale. Et Gwyneth Paltrow se montre si délicieuse, tant en blonde romantique qu'en adolescent fou de théâtre, qu'il serait malséant de faire la fine bouche devant ce spectacle haut en couleurs.
   
Bernard Sellier