The stranger, film de Thomas M. Wright, commentaire

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The stranger,
     2022, 
 
de : Thomas M.  Wright, 
 
  avec : Joel Edgerton, Sean Harris, Jada Alberts, Steve Mouzakis, Alan Dukes, Cormac Wright,
 
Musique : Oliver Coates


 Ne pas lire avant d'avoir vu le film...

 
Dans un autocar de nuit, deux hommes, Paul Emery (Steve Mouzakis) et Henry Teague (Sean Harris), font connaissance. Pour aider Henry qui semble paumé, Paul le présente à son ami Mark Frame (Joel Edgerton), qui a pas mal de connaissances dans le milieu criminel. Mark fait engager la nouvelle recrue par son boss, John (Alan Dukes). Une grosse opération semble en préparation... 
 
 Durant une petite moitié du film, le spectateur est ballotté dans une intrigue sombre, nébuleuse, noire comme la nuit souvent présente, déstructurée, et ne comprend pas très bien dans quoi va l'entraîner ce duo de personnages qui semblent, à des degrés différents, au bout du rouleau. Le rythme est lent, et les personnalités tardent à se découvrir. Mais une sorte de magnétisme hypnotique opère, et empêche de jeter l'éponge. Il faut dire que Joel Edgerton, tout comme Sean Harris, ont la capacité rare de capter l'attention par leur seule présence physique, et l'intensité intérieure que l'on devine à travers leur apparent détachement. Nous sommes également interpellés par les chevauchements fréquents de la bande sonore d'une scène sur une autre, ce qui perturbe à dessein la perception que nous avons de la réalité des évènements. Lorsque la véritable clé est livrée, on comprend le pourquoi de ces effets, qui avaient pour but de déstabiliser le spectateur, comme si celui-ci était soumis à un dédoublement de personnalité, et vivait, à l'image de Mark, dans deux mondes parallèles. Nous assistons alors à un montage stupéfiant orchestré par la police, dont on a du mal à croire qu'il est le reflet d'une histoire vraie survenue en Australie en décembre 2003. L'ensemble du récit est concentré sur le développement de la relation qui s'établit entre Henry et Mark. Pas de cadavres en décomposition, pas de filatures complexes, mais une étude des êtres au plus près des corps et des réactions épidermiques. Une approche originale tant sur le fond que sur la forme. Et jamais le simple geste d'un bras qui se lève (lors de la quête finale de preuves), n'a suscité une telle émotion brute et spontanée.

 Une fois n'est pas coutume, saluons cette acquisition de Netflix qui offre au spectateur, à l'image du récent "Meurtres sans ordonnance", lui aussi inspiré d'une histoire authentique mais traitée de manière différente, une expérience cinéphilique de qualité. Il est intéressant de noter que la famille de l'enfant assassiné, Daniel Morcombe, a condamné le film, jugé par eux "moralement corrompu et cruel" !
   
Bernard Sellier