Suspect, Saison 1, série de Matt Baker, commentaire

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Suspect,
       Saison 1,     2016, 
 
de : Matt  Baker, 
 
  avec : James Nesbitt, Sacha Dhawan, Imogen King, Joely Richardson, Ben Miller,
 
Musique : Stefano Cabrera

  
 
Ne pas lire avant d'avoir vu la série

 En visite à la morgue, pour l'éventuelle identification d'une jeune fille disparue, le capitaine de police Danny Frater (James Nesbitt) se rend compte que la morte qui vient d'être autopsiée par la doctoresse Jackie Sowden (Joely Richardson), n'est autre que sa fille Christina (Imogen King), avec laquelle il n'avait plus de relations. Elle se serait suicidée, mais son père est convaincu qu'il s'agit d'un meurtre déguisé...
 
 Voilà une série qui se démarque immédiatement de la majorité de ses consœurs par nombre de caractéristiques. Tout d'abord, par la brièveté des épisodes, limitée à une demi-heure. Ensuite par la construction en actes, chacun comportant en titre le nom d'un personnage susceptible d'apporter des éléments novateurs à l'enquête. Ce qui interpelle ensuite, c'est le statisme des scènes. Presque tous les épisodes respectent les trois unités classiques du théâtre ancien, à savoir celle de lieu, de temps et d'action. Avec des mouvements de caméra réduits au strict minimum, chaque récit est totalement centré sur des échanges verbaux, tout en laissant une large place aux silences et aux émotions. En fait, beaucoup plus qu'un polar, il s'agit d'une plongée dramatique dans des relations père fille catastrophiques, avec ce que cela implique de frustrations, de culpabilisations, de souffrances larvées, de dérives existentielles extrêmes. Nous sommes dans des choix narratifs et esthétiques à l'opposé de "Vengeances". Alors que la splendeur de la montagne autrichienne tenait une large place dans cette série, le décor est ici celui d'une ville britannique indéterminée sans âme ni personnalité. Le mutisme et l'intériorisation extrême de Blum sont ici remplacés par un verbiage constant et une exposition sans fards de tous les tourments intérieurs qui agitent Danny. L'intensité des échanges contribue grandement à développer l'intérêt du spectateur pour ces personnages au bout du rouleau et détenteurs de secrets souvent inavouables. Il est d'ailleurs intéressant que le scénario ait choisi de peindre la jeune morte sous des traits pour le moins sombres et peu engageants. Mais il faut reconnaître que, malgré la brièveté des épisodes, l'overdose guette par moments, d'autant plus que la multiplication interminable des champs-contre-champs devient lassante. Heureusement l'excellent James Nesbitt, déjà très apprécié dans "Bloodlands", capte sans peine l'attention du spectateur grâce à la profondeur de son implication dans le drame.

  Une création aux choix insolites, qui demande un certain investissement de la part du spectateur, mais qui mérite la vision.
 
Bernard Sellier