Thirteen, film de Catherine Hardwicke, commentaire

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Thirteen,
      2003, 
 
de : Catherine  Hardwicke, 
 
  avec : Holly Hunter, Evan Rachel Wood, Nikki Reed, Jeremy Sisto, Brady Corbet, Deborah Kara Unger, Sarah Clarke, 
 
Musique : Mark Mothersbaugh, Brian Zarate


 
Tracy Louise Freeland (Evan Rachel Wood) est une ado qui vit avec son frère Mason (Brady Corbet) chez sa mère, Mélanie (Holly Hunter). Celle-ci, séparée de son mari, survit en faisant des permanentes et tente d'élever tant bien que mal ses deux enfants. Tracy, subjuguée par l'aura dont bénéficie, au collège, la charmeuse Evie Zamora (Nikki Reed), commence à voler pour se mettre à son diapason. Elles deviennent amies inséparables et, sous l'égide de la belle Evie, Tracy se lance dans l'expérimentation du sexe et de la drogue. Mélanie ne tarde pas à se voir dépassée par les événements, d'autant plus que la présence de son compagnon occasionnel, Brady (Jeremy Sisto), détesté par Tracy, contribue à alourdir l'atmosphère générale... 
 
 Fondé, comme "Ken Park" sur le désespoir larvé qui gangrène un nombre de plus en plus important d'adolescents dont les repères ont disparu, ce film est tout de même loin du radicalisme et des choix extrémistes privilégiés par Larry Clark. L'ouverture de l'histoire, proche d'un mega clip agité visuellement, et amphétaminé aux musiques branchées, semble même lorgner vers les comédies déjantées qui fleurissent depuis quelques années. Mais, assez rapidement, la narration prend ses distances avec la pantalonnade, pour suivre un chemin plus sérieux, dans lequel la fièvre juvénile se mêle d'un mal-être occulte et grondant. Le scénario concentre à peu près la totalité des souffrances ou dangers qui guettent l'apprenti adulte : éducation mono-parentale, père scotché à son téléphone portable, incapable de consacrer une heure à ses enfants, compagnon de la mère drogué, besoin pathologique d'être reconnu, agressivité envers les représentants de l'autorité, rébellion contre la mère, découverte de la sexualité, exploration des limites et désir de transgression des interdits... Bref, toute la panoplie est en place.  
 
 Désireuse d'harmoniser le traitement visuel et narratif de son oeuvre avec l'existence extérieure agitée et les remous intérieurs tempétueux de ses personnages, la réalisatrice choisit une mise en scène survoltée, un montage haché, une bande-son agressive, qui, effectivement, ne détonent aucunement avec le sujet. C'est souvent un peu trop et parfois épuisant (quand on n'a plus quinze ans, bien sûr !). Cependant, malgré ces aspects clinquants, tape à l'oeil, Catherine Hardwicke parvient à donner une véritable profondeur à son récit, à procurer une vie intense à ses héroïnes. La justesse des relations entre elles est évidente. Cela vient en grande partie de la présence volcanique de Evan Rachel Wood, impressionnante d'authenticité aussi bien dans la révolte dépressive que dans l'exaltation superficielle. Mais il serait injuste d'oublier Holly Hunter, émouvante dans ses tentatives maladroites d'harmonisation, et Nikki Reed qui donne à son incarnation d'Evie le charme vénéneux et l'ambiguité qu'il requiert.  
 
 Une fresque hypervitaminée dans laquelle s'incruste une angoisse viscérale.
   
Bernard Sellier