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La tourneuse de pages,
     2006, 
 
de : Denis  Dercourt, 
 
  avec : Catherine Frot, Deborah François, Pascal Greggory, Jacques Bonnafé, Martine Chevallier, Antoine Martynciow,
 
Musique : Jérôme Lemonnier, Chostakovitch, Schubert

  
   
Mélanie Prouvost (Julie Richalet) a 8 ans et se passionne pour le piano. Lors d'un concours, la fillette est déconcentrée par l'un des membres du jury, la célèbre pianiste Ariane Fouchécourt (Catherine Frot), qui signe un autographe durant l'audition. Une douzaine d'années plus tard, Mélanie (Déborah François) entre comme stagiaire dans le cabinet d'un avocat renommé, Jean Fouchécourt (Pascal Greggory). Celui-ci cherchant une baby-sitter pour son fils, Tristan (Antoine Martynciow), la jeune fille propose ses services. Ariane, fragilisée psychologiquement par un accident de voiture survenu deux ans plus tôt, se rend compte que Mélanie connaît la musique. Elle l'engage comme "tourneuse de pages"... 
 
   Passablement déconcertant, ce film très court (moins de 80 minutes), au scénario simplissime, habité par un ascétisme inhabituel dans la production cinématographique grand public. Après une exposition des plus brèves, l'évolution dramatique attendue semble relativement prévisible. Mélanie commence un lent travail de sape dont on imagine sans peine quel sera son aboutissement. Mais le réalisateur, également co-scénariste, conduit sa narration avec une subtilité évidente. Après avoir un instant égaré le spectateur en lui faisant entrevoir une bifurcation ponctuelle vers un chemin style "La main sur le berceau", il le surprend à nouveau, éthérise son dénouement en refusant toute théâtralité. Approche intelligente certes, mais surtout intellectuelle, dans laquelle les suggestions, les non-dits, les regards, les silences sont rois. Cette austérité semble parfois bien artificielle, d'autant plus qu'elle provoque une certaine gratuité des évolutions psychologiques, et, par voie de conséquence, des rebondissements à la justesse douteuse. Quant aux personnages, le moins que l'on puisse dire est qu'ils n'appellent pas l'empathie du spectateur. A priori antipathique, Ariane devient touchante dans sa fragilité, tandis que Mélanie, étrangement monocorde, traverse la quasi totalité du film dans un état fantomatique souvent rebutant. Une œuvre qui fait penser à du Chabrol tiède, dans laquelle toutes les aspérités émotionnelles sont arasées et qui, de ce fait, ne provoque chez le spectateur qu'une attention froidement distinguée. Dommage...
   
Bernard Sellier