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Training day,
     1997, 
 
de : Antoine  Fuqua, 
 
  avec : Denzel Washington, Ethan Hawke, Scott Glenn, Tom Berenger, Harris Yulin, Snoop Dog, Eva Mendes,  
 
Musique : Mark Mancina


   
Flic depuis moins de deux ans, Jake Hoyt (Ethan Hawke), souhaite intégrer la brigade des stups. C'est un jour important pour lui, puisqu'il doit faire équipe, pour un essai, avec Alonzo Harris (Denzel Washington), un policier décoré à plusieurs reprises, et démontrer ses éventuelles capacités de futur Inspecteur. Le premier contact entre les deux hommes est plus que déroutant pour le jeune novice. Quelques événements mineurs, gérés de manière étrange par son mentor, ne manquent pas de surprendre Jake. Mais il n'est pas au bout de sa stupéfaction, lorsque Alonzo effectue une descente musclée chez Roger, qui semblait pourtant être son ami... 
 
   Denzel Washington, coutumier, comme l'était, jadis, Gary Cooper, des rôles de "gentils" (même lorsqu'il pète les plombs et prend quelques otages comme dans "John Q", c'est pour la meilleure cause qui soit...), a surpris son monde en campant une ordure de première grandeur, et n'a pas volé son Oscar. Mais, au-delà de ce contre pied remarquable, il est juste de célébrer également le travail du scénariste et celui du réalisateur. La trame commence comme des centaines d'autres : le "bleu" mis en contact avec un vieux routier, la prise de contact, stressante et déboussolante, avec la réalité de la rue qui n'est jamais enseignée dans les écoles de police, l'idéal théorique de pureté, confronté à la réalité laxiste et calculatrice... Rien de vraiment nouveau, si ce n'est, déjà, une intensité troublante dans les rapports humains, où ironie, brutalité et rigidité traditionnelles se colorent déjà d'une noirceur notable. Mais ce n'est rien, à côté de la descente aux enfers, subtilement programmée, qui attend le naïf Jake, et que la narration ne dégoupille, vicieusement, qu'aux deux tiers de l'histoire.  
 
   Toutes les péripéties superficielles, ingurgitées dans la première heure, comme un passage superflu dans le monde stéréotypé des bas-fonds vu par le cinéma, comme une installation vivante de personnages hauts en couleurs, mais habilement préfabriquée, prennent d'un coup une dimension majeure. Leur apparente inutilité dramatique se désintègre, pour laisser place à une position essentielle dans le puzzle retors qui se dessine d'un coup sous nos yeux. Mais la réussite de l'oeuvre tient surtout au fait que cet inattendu machiavélique n'est pas une fin en soi. Il n'est que la cerise sur le gâteau. L'ensemble est à marquer d'une pierre blanche, tant la dissection psychologique des personnages est aiguë, tant l'énergie détonante des pulsions est en permanence percutante, tant le réalisateur parvient, en quelques scènes, à plonger le spectateur dans l'atmosphère irrespirable des quartiers interdits. Ethan Hawke, parfois transparent, fait ici preuve d'une alliance réussie de fragilité et de véhémence désespérée. Quant à Denzel Washington, mélange fulminant d'ironie agressive, de douceur persuasive, et de fourberie criminelle, il est tout simplement grandiose ! 
 
   Particulièrement habile et hautement excitant !
   
Bernard Sellier