Dean Brannock (Bobby Cannavale) et sa femme Nora (Naomi Watts) emménagent dans une luxueuse villa en compagnie de leurs deux enfants, Ellie (Isabel Gravitt) et Carter (Luke David Blumm). Mais, très vite, ils se rendent compte que leurs voisins sont pour le moins étranges, voire inquiétants. Le jour où ils reçoivent une lettre de menaces signée par un prétendu 'veilleur' de la maison, ils contactent la police... Le récit ne s'embarrasse pas de préliminaires et plonge immédiatement le spectateur dans une atmosphère étouffante qui ne s'allègera pas une seconde jusqu'au dénouement. Le réalisateur, et en partie réalisateur, est loin d'être un néophyte, puisqu'il a déjà brillé en nous offrant des séries aussi réussies que «The politician» ou «Nip Tuck». Il choisit ici de se servir d'une histoire apparemment authentique pour développer une intrigue qui réussit à installer un climat permanent d'oppression et d'angoisse sans jamais recourir à une quelconque intervention de surnaturel ou de fantastique. La réussite est d'autant plus grande que l'avalanche de mystères repose uniquement sur des faits matériels ordinaires, souvent simplistes, qui ont cependant le pouvoir d'engendrer chez les personnages une paranoïa qui ne doit rien à la sorcellerie ou au paranormal. Cette série est un modèle quasi exemplaire du fait qu'il est tout à fait possible de créer une ambiance traumatisante, délétère, morbide, sans avoir besoin de faire intervenir des scènes spectaculaires ou fantomatiques. Certes, une majorité des personnalités qui environnent le couple Brannock sont passablement frappées et inquiétantes. Il y a Karen Calhoun (Jennifer Coolidge), l'amie de Nora, qui est une langue de vipère, les voisins complètement givrés, Pearl Winslow (excellente Mia Farrow), présidente de la société du patrimoine qui veille à ce que rien ne change dans l'apparence des maisons, le détective Rourke Chamberland (Christopher McDonald), qui semble se foutre éperdument de sa fonction, ou encore Maureen (Margo Martindale) qui passe son temps à observer ses voisins à la jumelle. Bien que cette galerie de personnages frappadingues soit à la limite de l'extrême, elle ne perturbe pourtant jamais la vraisemblance de l'histoire. Le récit parvient à conserver une rigueur dramatique constante, analysant avec justesse le délitement d'un couple confronté à un adversaire qui demeure à jamais invisible. Tous les évènements de ce drame demeurent dans une normalité qui devient peu à peu terriffiante sans jamais déborder d'un réalisme quotidien, et tous les acteurs sont investis à cent pour cent dans cette fresque sinistre qui, respect des faits authentiques oblige sans doute, se clôt sur une absence de résolution du mystère qui peut frustrer certains spectateurs.
Il n'empêche que cette série captive de bout en bout, même si elle aurait sans doute gagné à être raccourcie. Quant à son thème principal, la passion extrême pour les somptueuses demeures du New Jersey, elle pourrait être une démonstration magistrale de ce qu'est une idolâtrie pathologique, adressée aux adeptes du Bouddhisme qui justement prônent le non-attachement comme aide à la libération karmique. Bernard Sellier