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Zorro,
     Saison 1,    2024, 
 
de : Noé  Debré..., 
 
  avec : Jean Dujardin, Audrey Dana, Salvatore Ficarra, Grégory Gadebois, André Dussollier, Éric Elmosnino,
 
Musique : Julie Roué

 Ne pas lire avant d'avoir vu la série

 1821. Le personnage de Zorro est oublié. Don Diego de la Vega (Jean Dujardin) vit paisiblement dans la cité qui sera le futur Los Angeles, avec son épouse, Gabriella (Audrey Dana). Don Alejandro (André Dussollier), père de Diego, décide de passer sa fonction de maire à son fils. Il change d'avis devant la médiocrité de celui-ci, mais meurt subitement. Don Diego se trouve aussitôt confronté à l'odieux richissime Don Emmanuel (Éric Elmosnino), qui vient se faire rembourser les prêts effectués par l'ancien maire...
 
 Les premières scènes de cette série donnent le ton. Tout comme Sandrine Rousseau affichait devant le public sa joie de vivre avec un homme déconstruit, les créateurs de cette aventure ont fait le pari risqué d'offrir au public une version de celui qui a été le héros de toute une génération, Zorro, mais en format d'idole et de mythes déconstruits. Don Diego est devenu un benêt, réduit à une volubilité creuse, incapable du moindre courage, cherchant sa voie dans le rôle d'un gourou psychanalyste, ce qui donne des résultats pour le moins décevants. Tout comme Jean Dujardin avait incarné avec talent un improbable OSS117 (Rio ne répond plus, ou Le Caire, nid d'espions...), il entraîne ici le justicier noir dans une chute vertigineuse de son image de marque. Mais le spectateur retrouve tout de même les jalons classiques. Un Bernardo (Salvatore Ficarra) muet, une épouse envoûtée par ce brave aventurier, et un sergeent Garcia (Grégory Gadebois), touchant dans son statut de soldat demeuré. Mais le pauvre Zorro n'est pas le seul qui échappe à une caricature féroce. Don Emmanuel n'est pas mal non plus dans le genre, puisqu'il cumule à peu près toutes les tares : cupidité, racisme, égocentrisme, esclavagisme. Avec de tels bagages, l'histoire subit de sacrés dérapages.

 Au fil des évènements, se dessine une relecture très intéressante de la mythologie des héros, avec un jeu de miroirs entre le fond et la forme, entre le héros intérieur et son apparence publique. La transformation momentanée de Zorro en acteur jouant sa propre caricature sur la scène du théâtre de Don Emmanuel, est à ce titre hautement symbolique de la superficialité du mythe. Certaines séquences sont hilarantes, l'enterrement du héros, par exemple, mais aussi les désarrois du sergent Garcia, privé de toute sa raison de vivre après avoir cru tuer le justicier. Ce qui passe un tout petit peu moins bien, c'est le fait que le trait est souvent très appuyé, entraînant certaines scènes vaudevillesques à la limite du grotesque (le coup des sangliers...). Mais on doit reconnaître que les idées scénaristiques, aussi osées soient-elles, sont globalement excellentes, et que les acteurs se montrent tous parfaitement dans le ton de cette bouffonnerie beaucoup plus subtile qu'il n'y paraît. Jean Dujardin semble nager dans cette parodie comme un poisson dans l'eau, Audrey Dana allie charme et sensibilité, et on a parfois l'impression nostalgique de retrouver le regretté Jacques Villeret dans certaines intonations et expressions de Grégory Gadebois.

 Une série souvent jouissive qui, manifestement, n'a pas du tout enchanté les spectateurs américains, puisque le film est noté 5,6 sur le site IMDB. Il est sûr que nous sommes bien loin du classique traitement sérieux et propre sur lui des œuvres de super héros. Et c'est tant mieux !
 


   
Bernard Sellier