L'auberge rouge, film de Gérard Krawczyk, commentaire

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L'auberge rouge,
         2007, 
 
de : Gérard  Krawczyk, 
 
  avec : Gérard Jugnot, Sylvie Joly, Josiane Balasko, Christian Clavier, Urbain Cancelier, Jean-Baptiste Maunier, Anne Girouard,
 
Musique : Alexandre Azaria

 
 
Dans les temps post-révolutionnaires, Pierre (Christian Clavier) et Rose Martin (Josiane Balasko), tiennent l'auberge du Croûteux dans un coin désert des Pyrénées. Comment peuvent-ils survivre, alors que leur établissement se trouve en dehors des routes qu'empruntent habituellement les voyageurs ? De fort belle manière, merci. Leur recette ? Détrousser les quelques malheureux qui pointent leur museau, et se débarrasser des cadavres en nourrissant les cochons. Justement, les occupants d'un carrosse en difficulté demandent un abri pour quelques heures. Parmi eux, un prêtre, le Père Carnus (Gérard Jugnot), accompagné d'un jeune garçon, Octave (Jean-Baptiste Maunier), promis à la vie monastique... 
 
 Les hasards de la programmation en salles et sur Canal + nous ayant permis de visionner à quelques heures d'intervalle "L'auberge rouge" et "Hors de Prix", il nous a paru opportun, une fois n'est pas coutume, de composer un seul commentaire commun à ces deux films, tant leurs styles illustrent à merveille deux conceptions extrêmes de la "comédie" française. 
 
 D'un côté nous avons le genre "poids lourd" du rire, qui, des "Visiteurs 1" à "Mais qui a tué Pamela Rose", en passant par les "Taxi 2, 3 ou 4", oscille entre le relativement jouissif et le consternant. Dans le cas présent, nous serions plutôt dans l'entre deux, ce qui n'est pas forcément une situation confortable ou enthousiasmante. Les concepteurs ont manifestement choisi de drainer toute la famille en évitant les excès de gore et la vulgarité extrême. Cela dit, la finesse, l'inventivité, l'originalité sont inconnues au bataillon, et nous avons droit uniquement à des personnages taillés à coups de serpe, à des gags souvent moyennement drôles, parfois répétitifs, à des situations convenues, et à un Christian Clavier refaisant pour la énième fois du Clavier.  
 
 En face de cette farce épaisse (placée d'ailleurs, on n'en sera pas surpris, sous le signe du cochon), brille un petit joyau qui, malgré un sujet pouvant aisément verser dans la vulgarité, développe un scénario simple, mais subtilement diaphane, dans lequel évoluent deux personnages aussi différents qu'attachants. Les scènes sont brossées avec délicatesse, à coups de pinceaux légers, et les protagonistes se mettent sans peine au diapason de l'ensemble, se montrant expressifs en toutes circonstances, jusque dans les séquences muettes, où le regard remplace avantageusement la parole. A côté du lunaire Gad Elmaleh, Audrey Tautou se montre particulièrement délicieuse, alliant naturel, légèreté et naïve immoralité avec un charme rafraichissant. Certes, tout n'est pas parfait dans cette gentille comédie. Un alanguissement plane sur certains passages, le dénouement est un tantinet convenu, et les personnages secondaires manquent de présence. Mais l'ensemble se révèle séduisant et rafraichissant. 
 
 Deux conceptions radicalement opposées : le mammouth terrien face à la colombe aérienne (ou à la pie, si l'on préfère...). A chacun de choisir en fonction de son élément de prédilection.
   
Bernard Sellier